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Soumis par Breton Caroline le 9 September 2012

Il aura donc fallu que l’on négocie pendant 18 ans ; que le Groupe de travail de l’accession de la Russie à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) approuve ad referendum, le 10 novembre 2011, l’ensemble des textes énonçant les conditions de l’accession de la Russie ; qu’ensuite, les ministres des différents Etats membres adoptent à leur tour les modalités de cette accession lors de la Conférence ministérielle des 15-17 décembre 2011 ; qu’en outre, la Russie ratifie ces mêmes textes (c’est-à-dire que la chambre basse de son Parlement – la Douma – puis la chambre haute – le Conseil de la Fédération – les adoptent respectivement les 10 et 18 juillet 2012 et que le Président russe Vladimir Poutine signe, le 21 juillet, un projet de loi visant à mettre la législation commerciale russe en conformité avec les normes OMC), puis notifie au Secrétariat général de l’OMC la fin de ce processus de ratification, pour qu’enfin la Russie devienne, le 22 août dernier, le 156e membre de l’OMC, un moment qualifié d’« historique »  par le Directeur général de l’organisation, Pascal Lamy.

La Russie était effectivement la dernière grande puissance à ne pas être intégrée au système commercial multilatéral. Comme l’a déclaré le Commissaire européen au commerce, Karel De Gucht, cette adhésion devrait « faciliter les investissements et les échanges, aider à accélérer la modernisation de l’économie russe et offrir aux entreprises aussi bien russes qu’européennes de nombreux débouchés commerciaux », notamment grâce à la « [réduction des] droits à l’importation, [la limitation des] droits à l’exportation, [l’octroi] aux prestataires de services de l’UE [d’]un meilleur accès au marché et [l’assouplissement] [d]es règles et procédures dans de nombreux domaines touchant aux relations économiques bilatérales ». La Russie devra donc opérer de nombreuses réformes commerciales pour pouvoir respecter la série d’engagements qu’elle a pris dans l’accord relatif à son accession. Elle entend notamment abaisser de 3 points ses droits de douane et les limiter à 7% d’ici 2015. Elle espère ainsi, par ce biais, connaître un essor économique similaire à celui dont avait bénéficié la Chine après être devenue membre de l’OMC en 2001.

D’ailleurs, les relations commerciales de la Russie devraient tout d’abord s’améliorer avec les Etats-Unis une fois que l’amendement américain Jackson-Vanik sera abrogé. En effet, cet amendement, inscrit au titre IV du Trade Act de 1974, limite pour le moment le développement des relations commerciales entre les Etats-Unis et les pays qui ne disposent pas d’une économie de marché (c’est-à-dire, à l’origine, les pays appartenant au bloc communiste) et qui restreignent certains droits de l’homme (et notamment la liberté d’émigration). Or, comme le précise le Représentant au commerce américain, Ron Kirk, « in order for American manufacturers, workers, service providers, farmers and ranchers to take full advantage of Russia’s WTO membership, Congress must act to terminate Jackson-Vanik and authorize permanent normal trade relations for Russia ». Le 18 juillet 2012, le Comité des finances du Sénat a ainsi approuvé un projet de loi permettant de mettre un terme à l’amendement et autorisant le Président à étendre à la Russie le bénéfice de la clause de la nation la plus favorisée.

Cependant, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dans un rapport de 2011, indique que « la Russie demeure [encore] relativement en retard sur le plan économique, dans la mesure où elle se caractérise par une productivité et un revenu par habitant faibles, une forte inflation, des inégalités extrêmes, des résultats médiocres en matière de santé et d’environnement, un accès limité [et une faible utilisation des] technologies de l’information et de la télécommunication (TIC) ». L’organisation relève en outre qu’« un certain nombre de mesures vont devoir être prises pour lutter contre la corruption, renforcer l’Etat de droit, réduire le rôle de l’Etat dans l’économie, alléger les charges administratives qui pèsent sur les entreprises, veiller au respect du droit de la concurrence et libéraliser les régimes en matière d’échanges et d’investissement » afin de combattre « le manque de concurrence, l’atonie de l’innovation, la faiblesse de l’investissement et une dépendance accrue à l’égard des industries extractives ». La Russie devra donc réagir rapidement pour moderniser son économie si elle ne veut pas que celle-ci soit mise à mal par l’ouverture totale de ses marchés à la concurrence.

 

v. BRETON Caroline, "Achèvement de 18 ans de négociations relatives à l'adhésion de la Russie à l'OMC", Bulletin hebdomadaire Sentinelle, n°285, 4 décembre 2011.

Bulletin numéro 314