En date du 27 Avril 2012, l’Assemblée Générale et le Conseil de sécurité des Nations Unies ont procédé à l’élection du juge indien Dalveer Bhandari comme membre de la Cour Internationale de Justice afin de pourvoir la vacance de siège consécutive à la démission de M. Awn Shawkat Al-Khasawneh de la Jordanie, ancien juge et vice-président de la Cour. Cette élection vient en effet couronner le processus de renouvellement massif du principal organe judiciaire des Nations Unies, entamé depuis le 10 novembre 2011 et porte ainsi le nombre des juges à quinze, signe de la complétude de la Cour.
Retour sur l’élection du juge Bhandari en elle-même
Il est utile de rappeler qu’en raison de sa nomination en tant que Premier ministre du Royaume Hachemite de Jordanie, par le roi Abdallah 2, le juge Al-Khasawneh a démissionné de l’Auguste juridiction internationale le 20 novembre 2011 avec effet le 31 décembre 2011, laissant ainsi un poste vacant au sein de la Cour. Cette démission qui se justifie par l’incompatibilité entre la fonction de juge à la Cour Internationale de Justice (CIJ) et l’exercice de toute autre fonction politique ou administrative conformément aux dispositions de l’article 16 alinéa 1 du Statut de la Cour, a été entérinée d’abord par la CIJ elle-même, et ensuite par le Conseil de sécurité à travers la Résolution 2034 (2012). La vacance du siège du juge jordanien posait la nécessité de pourvoir à son remplacement pour la durée du mandat qui restait à courir, étant donné qu’il avait été réelu comme juge à la CIJ le 12 novembre 2008 pour un mandat venant à expiration le 5 février 2018. A cet effet, prenant note « avec regret » de la démission du juge Al-Khasawneh, et de la vacance qui en résultait le Conseil de sécurité, a fixé au 27 avril 2012, l’élection d’un nouveau juge à la Cour conformément aux dispositions de l’article 14 de son Statut .
De ce fait, à la date dûment fixée pour l’élection, deux candidats étaient en compétition notamment M. Dalveer Bhandari de l’Inde et M. Florentino P. Feliciano des Philippines étant donné que le Liban avait retiré la candidature de M. Ghaleb Ghanem. Par la suite, c’est M. Dalveer Bhandari qui a emporté la conviction des membres l’Assemblée Générale et du Conseil de Sécurité. Il a en effet été élu à l’Assemblée Générale avec une majorité de 122 voix contre 58 voix recueillis par Florentino Feliciano ; et au Conseil de sécurité par une majorité de 13 voix contre 2 pour M. Florentino Feliciano. Contrairement à l’élection du juge Julia Sebutinde de l’Ouganda qui avait donné lieu à plus d’un mois de tractations, celle du juge indien s’est faite après un seul tour de scrutin emportant la double majorité absolue à la fois à l’Assemblée Générale et au Conseil de sécurité.
Il faut dire que le juge Dalveer Bhandari qui fait son entrée pour la première fois à la Cour Internationale de Justice a été élu pour achever le mandat du Juge Al-Khasawneh qui expire le 5 février 2018, soit 6 ans. A ce titre, à la lumière des dispositions de l’article 2 alinéa 2 du Règlement de la Cour, le mandat du nouveau juge a pris effet au jour de son élection c'est-à-dire le 27 avril 2012.
Portrait du nouveau juge indien
Le choix porté par l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité des Nations Unies sur la personne de M. Dalveer Bhandari, pour exercer la prestigieuse fonction de juge à la Cour Internationale de Justice est fondé sur des considérations objectives tirées de son profil exceptionnel, tout en respectant les hautes exigences requises pour ladite fonction telles que précisées par l’article 2 du Statut de la Cour. L’on se souvient en effet, que ne peut être élu comme juge à la Cour, que toute personne qui jouit de « la plus haute considération morale » et qui réunit les conditions requises pour l’exercice, dans son pays « des plus hautes fonctions judiciaires », ou qui est un jurisconsulte « possédant une compétence notoire en matière de droit international ». Le profil de M. Bhandari est assez évocateur à ce titre et peut se résumer à travers trois figures principales à savoir, le juriste de haute facture, l’académicien de renom et l’homme intègre.
En tant que juriste de haute facture, il ressort du curriculum vitae de M. Bhandari tel que publié par le secrétariat des Nations Unies qu’il a été juge, avocat et conseiller juridique. D’abord, il a été juge à la Haute Cour de Delhi depuis 1991, puis président de la Haute Cour de Bombay à partir de 2004 et, juge à la Cour suprême de l’Inde depuis 2005. Ensuite, il a été avocat plaidant du principal groupe d’avocats de l’Union indienne et enfin, conseiller juridique permanent pour l’Etat de l’Uttar Pradesh et de nombreuses entreprises publiques devant la Cour suprême de l’inde.
En tant qu’académicien de renom, au-delà des enseignements qu’il a eu à donné dans des universités indiennes et étrangères, le juge indien, est membre du Conseil exécutif de la branche indienne de l’association de droit international depuis 1994, expert largement reconnue en droit international public et privé et, depuis 2007, président de la fondation indienne de droit international.
En tant qu’homme intègre, il faut simplement se référer à ce commentaire fort élogieux que l’Université de Tumkur (Inde) a fait à son endroit à l’occasion de son doctorat suivant lequel on reconnaît en lui un « homme de courage et d’intégrité. Juriste illustre dont la réputation n’est plus à faire. Pionnier ayant permis de renouveler le système judiciaire indien grâce à la mise en œuvre des pratiques innovantes. Fervent partisan de la justice pour les femmes, du droit à l’égalité et des droits de propriété intellectuelle… ».
A l’observation, il est loisible de noter que l’adéquation entre le profil de M. Dalveer Bhandari et les exigences de la fonction de juge à la CIJ, lui a permis d’ avoir la confiance de l’Assemblée Générale et du Conseil de sécurité pour intégrer la haute et prestigieuse fonction de juge de la CIJ.
Regard sur la configuration actuelle de la Cour
Comme précédemment noté, l’élection du juge indien à la cour internationale de justice marque d’abord la fin du renouvellement de la Cour. Car à l’issue des élections du 10 novembre 2011 et du 13 décembre 2011 où les juges Xue Hanqin (Chine), Peter Tomka (Slovaquie), Hisashi Owada (Japon) ont été réélus et le juge Gorgio Gaja (Italie) a été élu d’une part ; et le juge Julia Sebutinde (Ouganda) d’autre part ; un poste restait vacant. Celui-ci a été pourvu par l’élection du juge Dalveer Bhandari (Inde) parachevant ainsi l’intégralité du corps de magistrats de la Cour. Partant, la configuration actuelle du principal organe judiciaire des Nations Unies est la suivante :
M. Peter Tomka (Slovaquie), président
M. Bernardo Sepúlveda-Amor (Mexique), vice-président
MM. Hisashi Owada (Japon)
Ronny Abraham (France)
Kenneth Keith (Nouvelle-Zélande)
Mohamed Bennouna (Maroc)
Leonid Skotnikov (Fédération de Russie)
Antônio Augusto Cançado Trindade (Brésil)
Abdulqawi Ahmed Yusuf (Somalie)
Christopher Greenwood (Royaume-Uni)
Mmes Xue Hanqin (Chine)
Joan E. Donoghue (Etats-Unis d’Amérique)
M. Giorgio Gaja (Italie)
Mme Julia Sebutinde (Ouganda),
M. Dalveer Bhandari (Inde), juges.
A l’observation, malgré la présence relativement minoritaire des femmes au sein de la Cour (03 : Mmes Xue Hanqin, Joan E. Donoghue et Julia Sebutinde), la configuration actuelle est illustrative d’une forte représentation du BRICS qui ne dénote aucunement d’une certaine influence de ce groupe au sein de la Cour. En effet, à l’exception de l’Afrique du Sud, le Brésil (M. Antônio Augusto Cançado Trindade), la Russie (M. Leonid Skotnikov), l’Inde (M. Dalveer Bhandari) et la Chine (Mme Xue Hanqin) sont valablement représentés. Ce qui traduit tout simplement un certain équilibrage dans la représentation des Etats au sein de la Cour. Toutefois, la Cour reste et demeure un organe judiciaire indépendant qui est appelé à exercer les fonctions qui lui sont imparties en toute impartialité. Le point fondamental qui est à relever reste le maintien d’une représentation équitable des grandes formes de civilisation et des principaux systèmes juridiques du monde dans la composition actuelle de la Cour suivant les dispositions de l’article 9 de son Statut.
A présent, étant revitalisée dans sa composition, la Cour est en possession de la plénitude des compétences dont elle a besoin pour exercer les fonctions qui la caractérisent : celle de trancher sur la base du droit international tous les différends d’ordre juridique qui lui sont soumis et, celle d’apporter des éclaircissements substantiels à toutes les questions qui lui sont soumises par le biais de ses avis consultatifs.
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