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Soumis par Metou Brusil le 20 May 2012

Le Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) qui dépend de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a approuvé le 11 mai 2012 une série de directives ayant pour vocation d'aider les gouvernements à protéger les droits de propriété ou d'accès des peuples aux terres, aux forêts et aux pêches. Ces  Directives volontaires pour une Gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale  ont été élaborées après des mois de concertation entre les Etats, le secteur privé, la société civile et les organisations internationales. Il s’agit d’un texte de quarante- cinq pages, qui énonce les principes et pratiques pouvant servir de référence aux gouvernements lors de l'élaboration des lois et de l'administration des droits relatifs aux terres, aux pêches et aux forêts. Il s'agit de directives d'application facultative chargées d'exposer les principes et normes internationalement reconnues,  qui peuvent servir de référence aux gouvernements lors de l'élaboration des lois et de l'administration des droits relatifs aux terres, aux pêches et aux forêts. Bien que n’ayant pas de force obligatoire et relevant en tout état de cause de la soft law, ces directives  constituent le premier instrument international consacré à a gouvernance des terres.  Selon l'avant propos, ces directives ont vocation à devenir un document de référence car la FAO considère que l'élimination de la faim et de la pauvreté (...) dépendent dans une large mesure de la façon dont les personnes, les communautés et les autres acteurs accèdent aux terres.

  • Démarche inclusive  d’adoption du texte

L’élaboration des directives volontaires a suivi une démarche itérative, à travers l’institution d’une plateforme de dialogue et de concertation plutôt que d’un arsenal de règles inflexibles qu’il convient de suivre. En effet, ces directives ont été mises au point dans le cadre d'un processus de consultation inclusif  lancé en 2009 par la FAO. Elles ont ensuite été finalisées par des négociations intergouvernementales menées par le CSA et faisant intervenir des responsables des gouvernements, des organisations de la société civile, des représentants du secteur privé, des organisations internationales et des universités. Les “directives volontaires” découlent, en partie, de la Conférence internationale sur la réforme agraire et le développement rural tenue à Porto Alegre (Brésil) en 2006. Elles ont pour objet de renforcer la gouvernance foncière en proposant des directives aux gouvernements, aux organisations internationales de développement et aux autres parties concernées. Dans une certaine mesure, elles s’inspirent d’une initiative dont il faut espérer qu’elles contribueront à la renforcer; cette initiative, qui vise à mettre en place des principes et des directives pour une politique foncière en Afrique, est actuellement menée par la Banque africaine de développement, la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique et l’Union africaine, et elle a reçu l’aval du Sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine réuni à Syrte (Jamahiriya arabe libyenne) en juin 2009.

A.Réactions à l’accaparement des terres dans les PED

L’acquisition massive des terres par des investisseurs étrangers suscite une grande controverse et pose un sérieux problème des droits fonciers en matière d’investissements agricoles dans les pays en développement. Elle suscite également des interrogations relatives aux perspectives du développement à l’échelle planétaire et à la sécurité alimentaire. La ruée vers les terres africaines a été accélérée par la crise alimentaire de 2008, le développement des agro-carburants, la pression de certaines institutions internationales sur les Etats, la compétition des pays en développement pour attirer les investisseurs. Mais aussi par l’étendue des terres «non utilisées» dans le Sud et la disponibilité de la main d’œuvre. Ces problèmes ont ouvert des voies pour la création d’une espace international d’échanges sur les moyens d’améliorer les systèmes d’administration foncière et les investissements agricoles, de manière à renforcer les droits fonciers et les moyens d’existence des petits agriculteurs et éleveurs et des autres groupes de populations vulnérables. En effet, les droit fonciers inadaptés et non sécurisés dans divers pays augmentent la vulnérabilité, la faim, la pauvreté et peuvent conduire à des conflits et des dégradations environnementales, comme l’affirme le texte de la FAO. La plupart des terres concernées se situent en Afrique, en Amérique latine et dans certaines régions d’Asie, et il s’agit de terres qui appartenaient déjà de fait à des communautés rurales en vertu de tout un éventail de régimes fonciers différents, même si souvent les droits de propriété ne sont pas enregistrés. Selon différents rapports, les principaux pays visés sont les suivants: en Afrique: Angola, Bénin, Congo, Éthiopie, Libéria, Madagascar, Mali, Mozambique, Nigéria, République-Unie de Tanzanie, Soudan et Zambie; en Amérique latine: Argentine, Brésil, Mexique, Paraguay et Pérou; en Asie: Cambodge, Indonésie, Kazakhstan, Pakistan, Philippines, République démocratique populaire lao, Ukraine.

Cette course aux terres arables, notamment en Afrique et en Asie bénéficie très peu aux populations locales, souvent dépossédées de leurs terres et chassées selon les ONG. En conséquence, la FAO précise que les Etats devraient se prémunir contre les risques que les transactions à grande échelle portant sur les droits fonciers sont susceptibles de présenter. Les récentes études menées par l’IIED, la FAO, la Banque mondiale et l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires  (IFPRI) établi à Washington, confirment toutes les failles et les dangers potentiels qui incluent des risques de compromettre les efforts faits au niveau national pour accroître la production alimentaire, le danger que des projets agricoles exclusivement tournés vers des marchés extérieurs stimulent peu les activités économiques des pays concernés, ainsi que la menace potentielle qu’ils représentent pour les droits traditionnels des paysans africains sur ces terres. Le Rapport économique sur l’Afrique 2009, publication conjointe de l’UA et de la Commission économique pour l’Afrique de l’ONU (CEA), avertit de ne pas donner une trop grande priorité à l’expansion rapide des surfaces cultivées en raison de la dégradation de l’environnement à laquelle l’Afrique est déjà confrontée (www.uneca.org/cfm/2011/documents/French/AnnualReport_2011_FRE.pdf).

Sur le plan juridique, le débat porte sur la légitimité des opérations foncières réalisées par des investisseurs étrangers. En effet, s’agit-il de spoliations illégales ou douteuses ou d’acquisitions légitimes? Certains auteurs et ONG considèrent que toutes les acquisitions d’investisseurs étrangers constituent par nature une spoliation. Dans certains pays, ces spoliations sont le fait des élites nationales et locales et des agriculteurs en concurrence pour l’utilisation des terres (éleveurs et cultivateurs), et elles se produisent aussi au sein des familles (spoliation des femmes par les hommes, et même des veuves et des orphelins dans les régions où l’incidence du VIH/sida est élevée. Étant donné que la plupart des acquisitions massives de terres se produisent dans des pays où la gouvernance foncière laisse à désirer et où la corruption règne, leur légitimité est sujette à caution. En effet, en Afrique, seule une partie relativement réduite des terres fait l’objet d’un titre de propriété individuel. Même des terres qui sont officiellement classées comme non utilisées ou sous-utilisées peuvent en fait être assujetties à des jeux complexes d’usages “coutumiers”. “Il y a un besoin urgent de disposer de meilleures méthodes d’identifier les droits fonciers”, argumente la FAO dans un récent document d’orientation intitulé De l’accaparement des terres à la stratégie du gagnant-gagnant (ftp://ftp.fao.org/docrep/fao/011/ak357f/ak357f00.pdf). L’importance de cette question se traduit également par la mise au point conjointe par l’UA et la CEA d’un document intitulé “Cadre et directives pour les politiques foncières en Afrique”. La Banque mondiale souligne qu’il est important pour les institutions internationales d’aider les États africains à élaborer des cadastres et l’étude de l’IIED recommande que ces cadastres permettent l’enregistrement à titre collectif des terres d’une communauté afin de protéger le droit foncier “coutumier”.

L’étude de l’IIED affirme que la majorité des acquisitions à grande échelle de terres effectuées récemment en Afrique ont consisté en l’affermage à des entreprises étrangères ayant l’intention de les exploiter à l’aide de travailleurs agricoles; elle recommande donc que les États concernés incluent dans ces contrats des clauses qui garantissent l’utilisation de la main-d’œuvre locale.  On constate que même dans les pays dont les structures juridiques et les institutions chargées de la gouvernance foncière sont plus solides, certaines opérations n’ont pas toujours été effectuées dans la transparence. Cependant, dans un certain nombre de cas du moins, il semble que l’opération ait été négociée dans le cadre d’une procédure régulière. Par conséquent, il semble que les représentants légitimes des communautés aient été consultés en bonne et due forme, et que des efforts aient effectivement été entrepris pour faire en sorte que les communautés concernées tirent parti de ces opérations.  Certaines études mettent en valeur les bénéfices potentiels pour un secteur à court d’argent, tels : création de nouveaux emplois, introduction de nouvelles technologies, amélioration de la qualité des productions agricoles et possibilités de développer des activités de transformation des produits agricoles à haute valeur ajoutée, voire la perspective d’une “augmentation de la production alimentaire pour le marché national et pour l’exportation”, selon la FAO.  Une étude de l’IFPRI intitulée “Accaparement des terres” par les investisseurs étrangers dans les pays en développement: risques et opportunités conclut que pour que ces bénéfices deviennent réalité, il faut que les États acquièrent la capacité de négocier des contrats satisfaisants et de contrôler leur application, ce qui contribuera à créer “un scénario gagnant-gagnant pour les communautés locales comme pour les investisseurs étrangers” (www.ifpri.org/pubs/bp/bp013.asp).

B. Mobilisation

Tout un éventail d’intervenants issus de la société civile, des gouvernements des pays d’où proviennent les investissements et des pays bénéficiaires ainsi que d’organisations intergouvernementales ont exprimé leur inquiétude à propos des effets négatifs que l’augmentation de la demande de terres et d’eau et l’intensification de la concurrence entre leurs utilisateurs sont susceptibles d’entraîner sur les droits fonciers et la sécurité alimentaire des populations rurales des pays en développement. Il fallait chercher à concilier l’augmentation des investissements agricoles dans les pays du sud et le besoin de sécurité foncière de droits d’usage de l’eau et d’autres ressources naturelles, d’équipement, de compétences spécialisées, de technologies adaptées et d’un accès aux marchés des populations autochtones.  En effet, dans les pays en développement, ce sont les ménages de petits agriculteurs, qui investissent le plus dans la terre et dans l’agriculture, faisant ainsi vivre le tiers de la population mondiale.

II. Adoption d’un texte à contenu diversifié

Pour modérer et harmoniser la course sur les terres arables, les directives visent à fournir aux investisseurs et aux planificateurs des "indications claires sur les meilleures  pratiques". Elles appellent "les investisseurs privés à respecter les droits des communautés autochtones et de propriété légitime". Il y figure également  la promotion de l'égalité des droits des femmes à obtenir des titres fonciers, la création de systèmes de registres transparents accessibles aux ruraux pauvres, la lutte contre la corruption dans l'administration des droits fonciers ou encore la gestion des expropriations et de l'empiètement des villes sur les zones rurales.

A.Les objectifs

Comme le précise le texte des directives, la gouvernance foncière est un élément essentiel pour déterminer si les personnes, les communautés et les autres acteurs peuvent acquérir des droits – et s’acquitter des devoirs qui y sont associés – sur l’utilisation et le contrôle des terres, des pêches et des forêts, et comment ils pourront les obtenir. De nombreux problèmes fonciers surviennent en raison de la faiblesse de la gouvernance, et les tentatives faites pour résoudre ces problèmes dépendent de la qualité de la gouvernance. A cet égard, ces Directives visent à améliorer la gouvernance foncière des terres, des pêches et des forêts, au profit de tous, en accordant une attention particulière aux populations vulnérables et marginalisées. Elles visent à faire de la sécurité alimentaire une réalité, à réaliser progressivement le droit à une alimentation adéquate, à éliminer la pauvreté, à faire en sorte que les populations disposent de moyens de subsistance durables, à assurer la stabilité sociale, la sécurité en matière de logement, le développement rural, la protection de l’environnement et un développement économique et social durable.  Elles visent notamment à :

1.améliorer la gouvernance foncière en fournissant des indications et des informations sur les pratiques acceptées au niveau international, pour mettre en place des systèmes de droits relatifs à l’utilisation, à la gestion et au contrôle des terres, des pêches et des forêts;

2. contribuer à l'amélioration et à l'élaboration des cadres politique, juridique et organisationnel qui régulent l’ensemble des droits fonciers sur ces ressources;

3. renforcer la transparence des systèmes fonciers et améliorer leur fonctionnement;

4. renforcer les capacités et le mode de fonctionnement des organismes d’exécution, des autorités judiciaires, des collectivités locales, des organisations d'agriculteurs et de petits producteurs, pêcheurs et utilisateurs de la forêt, des pasteurs, des peuples autochtones et autres communautés, de la société civile, du secteur privé, du monde universitaire, et de toute personne concernée par la gouvernance foncière, et promouvoir la coopération entre ces divers acteurs.

B.Les principes

Le texte énonce un nombre considérable de principes  généraux d’une gouvernance foncière responsable et des principes de mise en œuvre.

Les principes généraux sont énoncés à l’endroit des Etats et des acteurs non- étatiques. A cet effet, les États devraient :

1. Reconnaître et respecter tous les détenteurs de droits fonciers légitimes et leurs droits. Ils devraient prendre des mesures raisonnables pour identifier, enregistrer et respecter les détenteurs de droits fonciers légitimes et leurs droits, que ceux-ci soient formellement enregistrés ou non; pour s’abstenir de toute violation des droits fonciers d’autrui; et pour s’acquitter des devoirs associés aux droits fonciers.

2. Protéger les droits fonciers légitimes contre les menaces et les violations. Ils devraient protéger les détenteurs de droits fonciers contre la perte arbitraire de ces droits, s’agissant notamment des expulsions forcées qui ne sont pas conformes aux obligations existantes qui leur incombent en vertu de la législation nationale et du droit international.

3. Promouvoir et faciliter l’exercice des droits fonciers légitimes. Ils devraient prendre des mesures concrètes pour promouvoir et faciliter le plein exercice des droits fonciers ou la réalisation de transactions portant sur ces droits, par exemple en faisant en sorte que les services soient accessibles à tous.

4. Donner accès à la justice en cas de violation de droits fonciers légitimes. Ils devraient proposer à chacun des moyens efficaces et accessibles, par l’intermédiaire des autorités judiciaires ou d’autres approches, pour régler les différends fonciers et pour assurer l’application des  décisions de façon rapide et à un coût abordable. Ils devraient prévoir des indemnisations justes et rapides en cas de privation de droits fonciers pour cause d'utilité publique.

5. Prévenir les différends fonciers, les conflits violents et la corruption. Ils devraient prendre des mesures concrètes pour empêcher les différends fonciers et faire en sorte que ceux-ci ne dégénèrent pas en conflits violents. Ils devraient s'efforcer d’empêcher la corruption sous toutes ses formes, à tous les niveaux et en toutes circonstances.

Quant aux acteurs non étatiques, y compris les entreprises, sont tenus de respecter les droits de l'homme et les droits fonciers légitimes. Les entreprises devraient agir avec la diligence nécessaire afin d’éviter d'empiéter sur les droits fondamentaux et les droits fonciers légitimes d'autrui. Elles devraient prévoir des systèmes adaptés de gestion des risques afin de prévenir les violations des droits de l'homme et des droits fonciers légitimes et de remédier à leurs effets. Les entreprises devraient prévoir des mécanismes non judiciaires, ou coopérer avec de tels mécanismes, afin d'offrir des voies de recours, y compris, s'il y a lieu, des mécanismes efficaces de règlement des différends au niveau opérationnel, pour les cas où elles auront porté atteinte à des droits de l'homme ou à des droits fonciers légitimes ou joué un rôle à cet égard. Les entreprises devraient identifier et évaluer toute violation potentielle ou avérée des droits de l'homme ou de droits fonciers légitimes dans laquelle elles auraient pu jouer un rôle. Les États devraient, conformément aux obligations internationales qui leur incombent, assurer l’accès à des voies de recours efficaces en cas d'atteinte aux droits de l'homme ou à des droits fonciers légitimes par des entreprises. Dans le cas des sociétés transnationales, les États d'origine doivent fournir une assistance tant à ces sociétés qu’aux États d'accueil afin de garantir que les sociétés en question ne contribuent pas à des atteintes aux droits de l'homme ou à des droits fonciers légitimes. Les États devraient prendre des mesures supplémentaires pour prévenir les violations des droits de l'homme et des droits fonciers légitimes par des entreprises appartenant à l'État ou contrôlées par celui-ci, ou bénéficiant d'un appui ou de services importants de la part d'organismes publics.

Les principes de mise en œuvre visent essentiellement le respect des droits de l’homme, des populations autochtones et de leurs communautés. A cet égard, le texte indique que les peuples autochtones et leurs communautés, les États devraient veiller à ce que toutes les actions soient compatibles avec les obligations existantes qui leur incombent en vertu de la législation nationale et du droit international et tienne dûment compte des engagements volontaires contractés en vertu des instruments régionaux et internationaux applicables et, le cas échéant, de la Convention de l’Organisation internationale du travail n° 169, concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants, et de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Les États et les autres parties devraient organiser des consultations de bonne foi avec les peuples autochtones avant de lancer un projet d'investissement qui aurait des incidences sur les ressources sur lesquelles les communautés détiennent des droits.  En outre, Les États devraient prendre des dispositions pour que les investissements comportant toute forme de transaction portant sur des droits fonciers, y compris des acquisitions et des accords de partenariat, soient conformes aux principes de consultation et participation énoncés dans les présentes Directives, de ceux dont les droits fonciers, y compris les droits subsidiaires, sont susceptibles d’être touchés. Les États et les autres parties prenantes devraient informer les individus, les familles et les communautés de leurs droits fonciers, les aider à développer leurs capacités en matière de consultation et de participation, et leur fournir en tant que de besoin une assistance professionnelle.

III. Persistance de nombreuses insuffisances

L’ampleur du phénomène d’accaparement des terres et les situations d’urgence causées par la crise alimentaire  auraient nécessité l’adoption d’un texte contraignant et opposable aux Etats et aux acteurs non étatiques en matière de gouvernance foncière. Or les directives émises par la FAO n’ont aucune valeur juridique obligatoire comme l’indique le texte. Elles appuient et complètent les initiatives nationales, régionales et internationales portant sur les droits de l’homme, ainsi que les initiatives visant à améliorer la gouvernance et elles apportent une sécurité foncière sur les terres, les pêches et les forêts. Elles ont une portée mondiale et peuvent être utilisées par les États, les organismes d’exécution, les autorités judiciaires, les collectivités locales, les organisations d'agriculteurs et de petits producteurs, pêcheurs artisanaux et utilisateurs de la forêt, les pasteurs, les peuples autochtones et autres communautés, la société civile, le secteur privé, le monde universitaire, et toute personne intéressée, pour évaluer la situation de la gouvernance foncière, identifier les améliorations susceptibles d’y être apportées et mettre en œuvre ces améliorations.

Si certaines organisations de la société civile  comme Oxfam France ont salué l'adoption des directives, elles regrettent toutefois que ces mesures ne soient pas juridiquement contraignantes et estiment qu'elles sont encore ''insuffisantes" face à l'accaparement "croissant" des ressources naturelles. Le CSA de la FAO entend aller plus loin sur la question des investissements agricoles responsables. Un processus de consultation sur le sujet doit démarrer en octobre prochain pour une durée d'un an. Il pourrait déboucher sur une série de recommandations courant 2013, a précisé l'agence onusienne. Les directives sur la gouvernance foncière "sont une première étape, mais bien d'autres mesures doivent encore être mises en œuvre pour garantir les droits humains d'accès à la terre et aux ressources naturelles", estiment les organisations françaises aGter et CCFD-Terre Solidaire, outre Oxfam dans un communiqué commun.  Le texte est "trop faible concernant la priorité qui doit être donnée au soutien apporté aux petits producteurs", déplorent les organisations. Les directives omettent également "d'inclure l'eau comme faisant partie des ressources foncières", regrettent-elles. Les organisations appellent les Etats à mettre en œuvre les directives "de manière efficace et sans tarder". Il est ''urgent que les gouvernements les utilisent pour adopter des législations obligatoires", a exhorté Angel Strapazzon du mouvement paysan international La Via Campesina.

            IV. Réactions

Pour le président en exercice de la CSA, Yaya Olaniran, "ces directives sont le fruit d'un processus inclusif de consultations et de négociations qui a duré trois ans, rassemblant de multiples parties prenantes et donnant à beaucoup d'entre elles voix au chapitre".  "Le résultat est que nous avons une série significative de principes et de pratiques que chacun - qu'il s'agisse des pays, du secteur privé, des agriculteurs ou de la société civile- peut soutenir et défendre, et qui se traduiront par des mesures concrètes". Il revient désormais aux pays qui ont approuvé les directives de les mettre en application sur le terrain, ajoute M. Olaniran.  "Ces changements ne se feront pas du jour au lendemain. Mais nous savons, au terme des vastes consultations menées par la FAO et du processus de négociation conduit par le CSA, que les directives bénéficient d'une forte adhésion et d'un vaste soutien. L'approbation par le CSA leur confère une force et une légitimité, et tous les pays concernés sont prêts à les adopter", a-t-il affirmé.

Parlant au nom des organisations de la société civile participant au processus des directives, Ángel Strapazzón, du Movimiento Campesino Indígena-Vía Campesina Argentina, a déclaré: "Nous nous félicitons du processus qui a été adopté pour la mise au point des directives, qui a permis à la société civile et aux représentants des petits producteurs vivriers de prendre part à toutes ses étapes, à attirer l'attention sur les problèmes de la vie réelle et à faire des propositions concrètes". "Nous accueillons avec satisfaction les Directives, en étant toutefois conscients qu'elles présentent des lacunes dans certains domaines fondamentaux pour les moyens d'existence des petits producteurs vivriers. Cela étant, nous invitons les gouvernements et les organisations intergouvernementales à  les mettre en œuvre et à améliorer au plus vite la gouvernance des régimes fonciers pour la sécurité alimentaire", a-t-il ajouté.

Luc Maene, Président du Réseau " International Agri-Food Network" représentant le secteur privé, a déclaré: "La gouvernance responsable des régimes fonciers est essentielle à la sécurité alimentaire, et c'est à juste titre que ce processus a été piloté par le Comité de la sécurité alimentaire nouvellement réformé. Les directives énoncent des éléments importants pour le bon fonctionnement des régimes fonciers.  Souvent, ils sont effectivement inexistants.  Pour nous du secteur privé et nos partenaires agricoles, il est important qu'une administration locale efficace des registres fonciers ne soit pas entachée de corruption.  Des règles équitables et transparentes servent l'intérêt général, en garantissant aux femmes une égalité d'accès à la terre et en encourageant l'investissement responsable tout au long de la filière agroalimentaire".

Le Directeur général de la FAO José Graziano da Silva a déclaré que l'Organisation est prête à offrir son soutien et son assistance aux pays pour l'adaptation et la mise en œuvre des directives. Comme par le passé dans le cas d'autres accords analogues - par exemple, le Code de conduite pour une pêche responsable - la FAO préparera une série de manuels techniques visant à aider les pays à adapter les directives à leurs contextes locaux et à les mettre en application. L'Organisation fournira également une assistance technique ciblée aux gouvernements dans ce même but. (http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=28163&Cr=FAO&Cr1)

Conclusion : La lutte contre les crises alimentaires que connaît actuellement le continent africain (notamment les pays du Sahel)  relève encore de la solidarité internationale et dépend de la bonne volonté des âmes charitables. Le processus inclusif entrepris au sein de la FAO permet de mobiliser  toutes les composantes de la société internationale pour la cause. Il est ici véritablement question de la sécurité humaine et de la satisfaction de l’un des besoins élémentaires de la personne., notamment le droit à l'alimentation. A cet égard, le président américain Barack Obama a annoncé vendredi un nouveau plan de 3 milliards de dollars (environ 2,36 milliards d'euros) pour la lutte contre la faim et la pauvreté en Afrique. L'initiative, financée par 45 entreprises privées, s'inscrit dans le prolongement des engagements pris en faveur de la sécurité alimentaire par les Etats-Unis et d'autres pays. La Maison Blanche a précisé que le plan se concentrerait sur la croissance agricole et pourrait sortir 50 millions de personnes de la pauvreté d'ici dix ans. Les dirigeants des pays les plus industrialisés devaient notamment évoquer la question de la sécurité alimentaire avec ceux de quatre pays africains.

 

        Le Traité International sur les semences de la FAO dans l'impasse (Moussa Abdoulaye)

Bulletin numéro 305