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Soumis par Drisch Jérémie le 20 May 2012

La Commission des limites du plateau continental (CLPC) a poursuivi ses travaux lors de sa 29ème session du 19 mars au 27 avril dernier (voir la déclaration du Président sur l'avancement des travaux de la CLPC). Instaurée en vertu de l’annexe II de la convention des Nations-Unies sur le droit de la Mer (Montego Bay, 10 décembre 1982), et en application de l’article 76 de cette même convention, la commission a pour mission d’ « examiner les données et autres renseignements présentés par les Etats côtiers en ce qui concerne la limite extérieure du plateau continental lorsque ce plateau s’étend au-delà des 200 milles marins et soumettre des recommandations conformément à l’article 76 » (article 3 1.a) Annexe 2 de CNUDM) et d’« émettre, à la demande de l’Etat côtier concerné, des avis scientifiques et techniques en vue de l’établissement des données citées à la lettre précédentes » (Article 3 1.b) Annexe 2 de la CNUDM).

En effet l’article 76 de la CNUDM dispose au paragraphe 8 du principe de l’extension du plateau continental d’un Etat côtier au-delà de la limite des 200 milles nautiques. Cette extension ne peut se faire de manière unilatérale par l’Etat côtier et seulement si la marge continentale s’étend au-delà des 200 milles nautiques à partir des lignes de base de la mer territoriale. La limite peut être repoussée soit à une ligne établie à 100 Nq au-delà de la l’isobathe 2500m (ligne reliant les points de 2500m de profondeur) soit à la limite des 350 Nq au-delà des lignes de base de la mer territoriales.

Lors de la 29ème session de la CLPC, un certain nombre de soumissions des Etats parties de la CNUDM ont été étudiées dont certaines ont fait l’objet de recommandations positives de la part de la commission.

 

Demandes étudiées

Durant cette session, la commission plénière s’est fait présenter les demandes d’extension du plateau continental récemment déposées par le Guyana et le Mexique :

 

  • Demande présentée par le Guyana

La soumission du projet d’extension du plateau continental guyanien a été transmise le 6 septembre 2011 et présentée à la commission le 11 avril 2012 par les représentants du Guyana. Dans leur demande, les autorités de ce pays ont affirmé qu’il n’existait aucun contentieux territorial et de délimitation maritime entachant leur demande. La commission est très claire quant à sa mission et son règlement intérieur rappelle à l’article 1 de l’annexe I que « la compétence pour les questions relatives aux différends pouvant résulter de la fixation de la limite extérieure du plateau continental revient aux Etats ». S’il existe un contentieux quelconque, la commission doit en être informée (article 2 de cette même annexe).

Dans le cas du Guyana, son affirmation d’absence de différends a fait l’objet d’une lettre adressée à la Commission par le ministre des affaires étrangères de la République bolivarienne du Venezuela (voir la lettre). Ce courrier précise que depuis les années 1960 un différend territorial oppose le Guyana au Venezuela sur le territoire de l’Essequibo situé à l’ouest de la rivière du même nom. De ce différend, il en résulte un impact important sur la délimitation des espaces maritimes des deux pays et l’extension de leur plateau continental puisque ce sont 140km de côtes que se disputent les deux Etats.

Le Guyana a répliqué par une note verbale en date du 4 avril 2012 que ce contentieux n’existait pas. Il s’appuie pour affirmer cela, sur l’arbitrage rendu par un juge russe le 3 octobre 1899. Malgré cet arbitrage, le contentieux entre les deux pays avait été ravivé dans les années 1960 et avait fait l’objet d’un accord signé à Genève le 17 février 1966. Ce texte prévoyait la constitution d’une commission mixte chargée de trouver une solution en 4 ans. Passé ce délai et aucune solution n’ayant été trouvée, un protocole fut signé à Port d’Espagne en 1970 gelant les revendications des deux parties et prévoyant le prolongement des discutions pour une période de 12 ans. En 2006, l’affaire a été portée à la connaissance du Secrétariat Général des Nations-Unies. 

La CLCS a pris en compte cette difficulté et confié en connaissance de cause l’examen de la demande d’extension à une sous-commission conformément à l’article 5 de l’annexe II et à l’article 42 du règlement intérieur de la commission.

 

  • Demande présentée par le Mexique pour le polygone oriental du golfe du Mexique

Le Mexique a transmis sa soumission d’extension du plateau continental pour le polygone oriental dans le golfe du Mexique le 19 décembre 2011. Présentée à la commission plénière le 11 avril dernier, cette demande n’a suscité aucune remarque des voisins du Mexique. Toutefois, elle fait suite à une demande déposée par Cuba le 1er juin 2009 pour la même zone du polygone oriental. Lors du dépôt de cette dernière demande, les Etats-Unis et le Mexique avait formulé par écrit des remarques à la commission lui demandant de faire attention à ce que les recommandations prises ne se fassent pas au détriment des droits de ces deux Etats. Tout comme la demande guyanienne, l’examen sera poursuivi en sous-commission.

Par ailleurs les demandes formulées par l’Uruguay et les îles Cook (plateau de Manihiki) ont continué à être étudiées en sous-commissions durant cette 29ème session. 

 

Recommandations de la CLPC

 

  • Informations présentées à la commission avant adoption des recommandations

Conformément au paragraphe 15 1 bis) du règlement intérieur, les Etats peuvent présentés des informations supplémentaires relatives à leur demande après les travaux effectués en sous-commission et avant l’adoption d’une recommandation par l’assemblée plénière. Ce fût le cas des demandes de la Barbade, de la France (concernant la zone des Antilles françaises et des îles Kerguelen) et des Philippines (concernant la région de Benham Rise).

 

  • Recommandations adoptées

La CLPC a adopté au cours de sa dernière session une série de quatre recommandations concernant les soumissions formulées par la Barbade, le Japon, la France (zone des Antilles françaises et des Îles Kerguelen) et les Philippines (concernant la région de Bentham Rise). Conformément à l’article 76 de la convention de Montego Bay, une fois ces recommandations adoptées, elles servent de base à la fixation définitive des limites externes du plateau continental.

La demande effectuée par le Japon a suscité de nombreux débats. Le projet de recommandation de la commission avait déjà été étudié lors de la 28ème session se heurtant à la problématique du bassin de Shikoku et de l’atoll d’Okinotori. En effet, le petit atoll inhabité, affleurement du bassin des Philippines est au cœur d’une polémique qui agite aujourd’hui encore les presses chinoises et japonaises. Le Japon revendique une zone économique exclusive de 200 milles marins autour de cet atoll ainsi que l’extension du plateau continental afférent. Une partie de l’espace maritime et sous-marin autour de cet îlot a fait aussi l’objet de contestations auprès de la CLPC par Palaos. La commission n’a reconnu, dans sa recommandation, l’extension du plateau continental qu’en s’appuyant sur le territoire terrestre du Japon sans prendre en compte Okinotori.

Concernant la soumission de la Barbade, il est à noter qu’elle a fait l’objet d’une soumission révisée après une première demande qui avait été contestée par les Etats voisins (Trinité-et-Tobago, Suriname et Venezuela).

La demande française concernant les Antilles françaises et les îles Kerguelen a aussi fait l’objet d’une recommandation sans que celle-ci ne présente de difficultés. Il est à noter que cette demande est partielle car concernant les îles Kerguelen, la partie du plateau continental attenante à l’espace antarctique n’est pas délimitée pour respecter les dispositions du Traité de l’Antarctique. La France se réserve le droit de présenter des éléments à ce sujet ultérieurement bien que la période de 10 ans prévue par l’article IV de l’annexe II de la convention de Montego Bay pour soumettre ses demandes d’extension du plateau continental après l’entrée en vigueur de la convention soit passée.

 

Vie de la CLPC

Au cours de la 29ème session de la CLPC, un nouveau président a été élu à la suite du décès d’Alexandre Tagore Medeiros de Albuquerque (Brésil) le 29 mars 2012. Le nouveau président est M. Galo Carrera Hurtado (Mexique).

Les membres de cette commission étant élus pour 5 ans renouvelables et les experts siégant actuellement ayant été désignés en 2007, la commission choisira ses 21 membres lors de la prochaine Réunion des Etats parties à la Convention qui siègera du 4 au 11 juin 2012. La trentième session se déroulera quant à elle du 30 juillet au 10 août prochain.

 

Seychelles / Maurice : 1er accord d'extension conjointe du plateau continental et de co-gestion, Anne-Claire Dumouchel, Bulletin Sentinelle n°299, 25 mars 2012

Année 2008 : l’année d’une augmentation sans précédent des demandes soumises à la Commission des Limites du Plateau Continental, Michel Djimgou Djomeni, Bulletin Sentinelle n°171, 21 décembre 2008

Extension de la limite extérieure du plateau continental au-delà de 200 milles : la CLPC est saisie de deux nouvelles demandes, Tidiani Couma, Bulletin Sentinelle n°150, 18 mai 2008

Plateau continental : l’UA envisage de demander l’extension du délai de saisine de la Commission au-delà de 2009, Tidiani Couma, Bulletin Sentinelle n°149, 18 mai 2008

Commission des limites du plateau continental : premières recommandations favorables à l’extension du plateau continental au-delà de 200 milles, Tidiani Couma, Bulletin Sentinelle n°146, 27 avril 2008

Le Mexique saisit la commission des limites du plateau continental, Tidiani Couma, Bulletin Sentinelle n°133, 20 janvier 2008

L’Irlande soumet une proposition sur les  limites  de son  plateau continental, Tidiani Couma, Bulletin Sentinelle du 19 juin 2005

Bulletin numéro 305