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Soumis par Dumouchel Anne… le 29 January 2012

M. le sénateur Roland Courteau, à l’occasion de la séance au Sénat du 10 janvier 2012, a obtenu la réponse à sa question posée le 4 août dernier (question n°1381) relative à la politique de lutte contre la pollution en mer Méditerranée à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Il avait précédemment établi un rapport (résumé du rapport) qu’il avait alors transmis à Mme la ministre l'été dernier.

Le contenu de ce rapport met en avant les problèmes de pollution (passée et actuelle) et de gouvernance de l’espace maritime Méditerranéen. Il insiste notamment sur l’incapacité d’action de l’Union pour la Méditerranée (UpM) dans sa configuration actuelle, et suggère ainsi une révision de son mode de fonctionnement pou qu’elle puisse être opérationnelle dans son aspect, en l’espèce, environnemental, en ayant également pour but de réduire les écarts Nord-Sud.

Afin de protéger l’environnement marin en Méditerranée et en améliorer la qualité, notamment au regard des estimations – plutôt pessimistes – des évolutions à venir d’ici 2030, le sénateur émettait, dans son rapport, dix recommandations :

-« Unifier la gouvernance politique de la lutte contre la pollution en Méditerranée ;
-Activer les coopérations de recherche sur la milieux méditerranées ;
-infléchir les conditions de délivrance des supports financiers aux investissements anti-pollution;
-apurer le passé ;
-préparer la réponse au développement des pollutions générées par l’économie immatérielle ;
-mieux prendre en compte les conséquences futures du changement climatique ;
-renforcer la lutte contre les rejets illicites d’hydrocarbures et la coopération en cas de rejets accidentels ;
-accroître la sécurité du trafic maritime en Méditerranée ;
-accorder une attention particulière à certains sujets de recherches ;
-réactiver la politique de création d’aires marines protégées ».

La question posée par le sénateur à la ministre portait sur sa réception du rapport et son appréciation sur ces recommandations. Force est de constater que la réponse de M. Thierry Mariani, ministre auprès de la ministre de l'écologie, n’apporte pas les éléments certainement attendus par le sénateur. Le ministre explique ainsi que la France est très engagée dans la lutte contre la pollution maritime en Méditerranée, et rappelle les divers instruments existants, tout en précisant que celle-ci se fait à deux niveaux : régional et bilatéral :    

Une approche régionale et bilatérale

Le ministre rappelle que la lutte contre la pollution en Méditerranée est régie par plusieurs instruments auxquels la France est partie : la Convention de Barcelone pour la protection de la Méditerranée, l’UpM, la "politique européenne de voisinage à l’attention des pays du voisinage sud", accords bilatéraux et coopération bilatérale (notamment dans le cadre de l’Agence française de développement et du Fonds français pour l’environnement mondial ; également accord RAMOGE de 1976 entre la France, l’Italie et Monaco ; Lion Plan entre la France et l’Espagne ; accord Pélagos entre Monaco et l’Italie).

Le ministre insiste tout particulièrement dans sa réponse sur le rôle d’impulsion joué par la France dans la lutte contre les pollutions maritimes : rôle joué dans le cadre de l’UpM, de la Convention de Barcelone, dont elle est le premier contributeur, assistance technique portée aux pays du Sud dans le cadre du Plan d’action pour la Méditerranée. Il illustre ainsi l'investissement français dans la région.

Une approche nationale, dans un cadre européen

Le ministre rappelle que l’action de la France pour la protection de la Méditerranée s’inscrit dans le cadre de directives européennes, la directive-cadre « Stratégie pour le milieu marin », dont l’application s’appuie sur les conventions internationales citées ci-dessus ; directive-cadre sur l’eau, dans son volet « eaux côtières ». L'action française s'inscrit donc dans un cadre global, et n'est, et ne peut être, indépendante.

Une question finalement occultée, ou une suffisance des moyens institutionnels actuels?

Le ministre n’est ainsi pas revenu sur la question relative à la réforme de l’UpM  évoquée par le sénateur, consistant à créer une « UpM à deux vitesses » afin de réussir à surmonter les difficultés que connaît l’institution, difficultés liées au processus décisionnel (règle de l’unanimité conduisant au blocage) mais aussi à son impuisance à tenter de résoudre le conflit israélo-palestinien (voir un article sur l'échec de l'UpM). L’absence de réponse du ministre à ce sujet pourrait être interprétée comme un rejet de cette proposition qui, de toutes façons, ne saurait être prise que par les membres de l’UpM dans leur ensemble, non par la France uniquement. Il semblerait donc que la France n’entende pas faire cette proposition. Surtout, celle-ci n'est peut-être pas à l'ordre du jour dans un contexte de difficultés d'affirmation et de reconnaissance de l'UpM par les acteurs nationaux et régionaux (v. note Sentinelle "L'UpM, un processus relancé?", Anne Claire Dumouchel). Le moment est peut-être mal choisi ?

Ce simple rappel des instruments existants signifie peut-être pour le ministre qu’ils sont déjà suffisants, et doivent être exploités au mieux de leurs mécanismes ; en créer de nouveaux ne serait ainsi peut-être que les multiplier sans pour autant assurer leur effectivité. Il convient certainement de mettre davantage à profit les mécanismes existants. Mais, à l’inverse, cette réponse peut aussi témoigner du fait que la question de la lutte contre la pollution en Méditerranée est si complexe que, reposant sur la coopération des États riverains, elle ne peut être uniquement assumée par la France qui, dès lors, ne peut répondre seule aux propositions formulées par M. le sénateur. Finalement, le sénateur demande à ce que le ministre serve « d’aiguillon » pour relayer ces propositions aux ministres de l’écologie et de l’enseignement supérieur et de la recherche. S'il est bien une certitude, c'est que la politique de lutte contre la pollution dans la région implique de nombreux acteurs, tant politiques que scientifiques. La volonté des Etats de la région est la première condition pour faire fonctionner le système de lutte contre la pollution en Méditerranée.

Bulletin numéro 291