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Soumis par Moubitang Emmanuel le 30 September 2012

INTRODUCTION

Le 26 septembre 2012, le Secrétaire général des Nations Unies a convoqué, à New York, une réunion de haut niveau sur le Sahel au cours de laquelle les États et les organisations régionales et internationales ont appuyé l’élaboration d’une Stratégie régionale intégrée des Nations Unies pour le Sahel et exprimé leur détermination à appuyer le plein rétablissement de l’ordre constitutionnel au Mali ainsi que son intégrité territoriale. 

Les participants à cette réunion ont reconnu la nature « complexe, multidimensionnelle et transfrontière » des menaces auxquelles fait face la région du Sahel, qu’il s’agisse de la prolifération et du trafic des armes, des déplacements forcés ou des changements dans les modes de pacage. 

La présence accrue des groupes terroristes, la traite des êtres humains, le trafic de drogues et celui des armes ont été cités parmi les défis les plus pressants pour la sécurité de la région. 

Les participants à ladite réunion ont appuyé l’élaboration d’une Stratégie régionale intégrée des Nations Unies pour le Sahel et souligné la nécessité d’en discuter davantage avec les organisations nationales, régionales et sous-régionales ainsi que d’autres partenaires. À cet égard, ils ont d’abord salué l’intention du Secrétaire général de nommer un Envoyé spécial pour le Sahel chargé d’entamer des consultations avec les pays de la région et les partenaires internationaux. Ils ont ensuite discuté de l’impact de la situation au Mali sur la région du Sahel.  Ils ont aussi exprimé leur détermination à appuyer le plein rétablissement de l’ordre constitutionnel dans le pays ainsi que son intégrité territoriale.  Ils ont également appelé à une feuille de route claire pour une transition devant mener au règlement du conflit dans le Nord du Mali et à la tenue des élections le plus rapidement possible. Ils ont en outre appelé la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’Union africaine, les Nations Unies et les pays voisins à travailler avec le Gouvernement intérimaire du Mali pour promouvoir une solution à la crise qui ne peut être trouvée, disent-ils, que si le Gouvernement et le peuple malien s’approprient le processus et dirigent le dialogue. Ils ont enfin lancé un appel au Conseil de sécurité pour qu’il adopte une résolution fondée sur la résolution 2056 (2012) pour mobiliser les efforts internationaux. 

Selon M. Ban Ki-moon, toute tentative de résoudre cette crise par la force doit cependant être examinée avec le plus grand soin, car elle pourrait avoir des conséquences humanitaires importantes, notamment de nouveaux déplacements de population et une restriction de l'accès aux organismes humanitaires.

Comme l’a si bien souligné le Président français à la tribune des Nations Unies, « ce qui se produit au Nord Mali n’est pas un défi pour les autorités de ce pays seulement, c’est une menace pour l’Afrique de l’Ouest et le Maghreb. C’est également un risque pour l’ensemble de la communauté internationale. Car quand un territoire grand comme la France est occupé par des groupes terroristes dont le but n’est pas simplement de contrôler une population, de la punir, de la soumettre, mais de constituer une base arrière pour mener des offensives de même nature terroriste sur les Etats de la région, alors nous sommes devant une menace qui concerne l’ensemble du monde ». (http://www.franceonu.org/la-france-a-l-onu/espace-presse/interventions-en-seance-publique/autres-instances/article/26-septembre-2012-evenement-de)

En d’autres termes, la situation au Nord Mali en particulier et dans le Sahel en général (I) appelle la mobilisation de l’humanité tout entière (II).

I)- LA SITUATION DANS LE SAHEL

            Le Sahel se trouve dans une phase critique. « Les troubles politiques, les conditions climatiques extrêmes et la fragilité des économies sont autant de facteurs qui font le lit d'une crise majeure », a prévenu M. Ban Ki-moon lors d'une réunion de haut niveau en marge de la 67ème  session de l'Assemblée générale de l'ONU. À la crise politique et l'insécurité au Mali (A), s'ajoutent les problèmes de pauvreté extrême, le manque de développement (B).

A)- La crise politique et l’insécurité au Mali

Aujourd’hui, une unanimité se dégage entre tous les grands pays du monde pour « arrêter » le péril djihadistes dans la bande sahélienne à partir du Nord du Mali. A part les Etats Unis, qui continuent, officiellement du moins, à préconiser des élections d’abord afin de doter le pays d’un pouvoir légitime et démocratique avant d’entamer la reconquête des régions du Nord, les autres membres du Conseil de sécurité, avec en tête la France, sont résolument engagés à soutenir « toute action visant le rétablissement total de l’intégrité territoriale du Mali » dans les meilleurs délais. La Chine, la Russie, la Grande Bretagne, l’Allemagne, l’Union européenne, entre autres, ont ouvertement manifesté leur entière disponibilité à « soutenir et à accompagner » le Mali pour bouter les extrémistes salafistes des 2/3 du territoire qu’ils contrôlent depuis la débâcle de l’armée malienne au tout début de l’année 2012. (http://www.maliweb.net/news/la-situation-politique-et-securitaire-au-nord/2012/09/27/article,94654.html )

Aussi, depuis des mois, de la CEDEAO à l’ONU en passant par l’Union africaine, la crise malienne fait l’objet d’intenses activités diplomatiques. La 67ème Assemblée générale de l’ONU, tenue à New York le 25 septembre dernier, suivie d’une conférence internationale sur la sécurité au Sahel dès le lendemain, jamais, question africaine n’avait suscitée autant de mobilisation de la part des « grands » de ce monde. En tête de file se trouve naturellement la France, dont le Président François Hollande a utilisé des mots très durs pour décrire l’urgence et l’extrême gravité de la situation au Mali et au Sahel.

 A ce sujet, tout en dénonçant l’immobilisme des Nations Unies dans la gestion de la crise au Sahel, en général et particulièrement au Mali, le Président français a mis l’accent sur « l’urgence à intervenir » pour circonscrire les graves menaces qui pèsent sur la sécurité internationale à partir des activités terroristes qui se développent actuellement dans le Nord du Mali.

Comme on peut le constater, la communauté internationale s’apprête à apporter tout son soutien au Mali pour libérer la partie de son territoire aux mains des intégristes et autres narcotrafiquants. Mais la situation n’est malheureusement pas encore totalement stabilisée au Sud dans la mesure où tout récemment, des policiers en armes se sont tirés dessus dans la capitale, les uns accusant les autres d’avoir bénéficié « de faveurs indues » à cause de leur seule proximité avec l’ex-junte. C’est l’une des conséquences du manque de développement dont souffre le Mali.

B)- Le manque de développement au Mali

Les catastrophes naturelles, en particulier les inondations, les sécheresses et les essaims d'acridiens, associées à la volatilité des prix des denrées alimentaires, portent atteinte à la résilience des populations et menacent le développement régional.

La stratégie présentée par le Secrétaire général des Nations Unies pour aider le Mali et la région vise à mobiliser l’ensemble des agences, des fonds, des programmes et des institutions financières relevant des Nations Unies pour le Sahel.

Pour le Président français, il y a une double urgence en la matière. La première urgence est de « dominer la crise alimentaire », qui fait qu’au malheur du terrorisme s’ajoute le malheur de la pauvreté et de la faim. La France s’impliquera pleinement dans le programme européen AGIR et souhaite qu’il y ait une mobilisation de toutes les banques multilatérales pour agir encore davantage pour le développement rural. La seconde urgence c’est par rapport aux personnes déplacées : plusieurs dizaines de milliers dans toute la sous-région. En raison de l'instabilité qui règne dans le Nord du Mali, plus de 260.000 personnes ont dû fuir dans les pays voisins, mettant à rude épreuve les infrastructures socioéconomiques déjà fragiles de ces pays.

Le Sahel connaît de profondes fragilités, tant politiques, qu’économiques et sociales qui tendent à déstabiliser la région. L’Etat de droit est faible, l’exclusion sociale et la discrimination y sont quant à elles très prononcées. Les questions sécuritaires et humanitaires sont également un enjeu de taille et mises en avant par le Secrétaire général des Nations Unies. Ces menaces et défis ne connaissent pas de frontières et de domaines, et leurs solutions doivent être l’objet d’une action coopérative et globale.

D’où la mobilisation de la communauté internationale pour le Sahel.

II)-LA MOBILISATION DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE POUR LE SAHEL

Le Secrétaire général de l’ONU a convoqué mercredi dernier, à New York, une réunion de haut niveau sur le Sahel au cours de laquelle les États et les organisations régionales et internationales ont appuyé l’élaboration d’une Stratégie régionale intégrée des Nations Unies pour le Sahel (A) et exprimé leur détermination à appuyer le plein rétablissement de l’ordre constitutionnel au Mali ainsi que son intégrité territoriale (B).

 

A)- L’élaboration d’une Stratégie régionale intégrée des Nations Unies pour le Sahel

Face à la situation qui prévaut au Sahel, la réponse de la communauté internationale doit se manifester par une plus grande mobilisation aux côtés des pays concernés contre ces fléaux, c’est précisément l’objectif premier de la stratégie de l’ONU pour le Sahel en cours d’élaboration. (http://www.affaires-strategiques.info/spip.php?article7086)

 

D’après la résolution 2056 qui a été adoptée le 5 juillet 2012, l’ONU s’engage à maintenir la paix et la stabilité au Sahel. (http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/pays-zones-geo/mali/la-france-et-le-mali/evenements-19439/article/adoption-de-la-resolution-2056-du) La stratégie régionale intégrée pour le Sahel englobe ainsi la sécurité, la gouvernance, le développement, les droits de l’Homme, et les questions humanitaires dans une région déstabilisée et affaiblie.

La stratégie intégrée serait un moyen efficace afin de diriger l’engagement de l’ONU au Sahel, tout en entretenant des relations avec les acteurs sur place : organisations régionales et gouvernements entre autres. La priorité est donnée à la mise en place d’un forum pour les partenaires régionaux et internationaux afin que ces derniers puissent discuter et coordonner leurs stratégies dans la région. A propos de ces partenaires : « L’ONU est prête à œuvrer avec eux dans la mise en œuvre de la stratégie, en s’appuyant sur les initiatives déjà mises en place en vue d’offrir un soutien international cohérent et coordonné aux populations et aux Etats du Sahel ».

La stratégie intégrée fournit un cadre conceptuel et des priorités stratégiques pour diriger l’engagement de l’ONU au Sahel au niveau régional et établir les bases de consultations et de suivi avec les organisations régionales, les gouvernements et les acteurs clefs dans la région.

Le processus en cours au niveau de l’ONU constitue un prolongement de la conférence de haut niveau sur le partenariat, la sécurité et le développement tenue en septembre 2011 à Alger à l’initiative des pays du champ et à laquelle l’ONU a été pleinement associée. (http://www.maliweb.net/news/non-classe/2011/09/12/article,28557.html)

Cependant, pour permettre à cette stratégie de l’ONU d’être viable et durable, elle devrait tenir compte de certaines considérations.
Il s’agit, tout d’abord, de tenir compte des vues et évaluations des pays de la région du Sahel, s’agissant notamment de leurs besoins.
Qui plus est, cette stratégie doit être complémentaire avec les stratégies régionales existantes à l’instar de celle des pays du champ qui ont convenu d’une stratégie régionale orientée vers la lutte contre le terrorisme et le crime transnational organisé ainsi que la lutte contre la pauvreté.

Sur ce point, les pays du champ ont mis en place des mécanismes communs qui couvrent les dimensions politique (Comité politique), militaire (Comité d’état-major opérationnel conjoint, (CEMOC) et sécuritaire (Unité fusion et liaison).
 

Aussi, la stratégie en cours d’élaboration par l’ONU doit contribuer à créer des synergies avec les stratégies des autres partenaires comme celles de l’Union européenne et des Etats-Unis. Sa mise en œuvre passe nécessairement par le rétablissement de l’intégrité territoriale du Mali.

B)- Le rétablissement de l’intégrité territoriale du Mali

            Après des semaines d'atermoiements et nombre de signaux contradictoires, le Mali s'est finalement résolu, lundi 24 septembre 2012, à demander l'aide de l'ONU pour pouvoir espérer reprendre un jour militairement le contrôle du Nord du pays tombé depuis six mois entre les mains de groupes islamistes lourdement armés. Cette démarche importante, soutenue à bout de bras par Paris, n'annonce pas pour autant la fin prochaine d'une crise malienne menaçant chaque jour davantage la stabilité régionale. En effet, il faudra non seulement convaincre le Conseil de sécurité, mais également les plus sceptiques, dont le voisin algérien. Enfin, on devra résoudre le casse-tête opérationnel.

Convaincre le Conseil de sécurité

L’accord entre la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et le Mali, le 23 septembre 2012, sur un soutien militaire pour reconquérir le Nord de ce pays, ouvre la voie à une implication de la communauté internationale. Ces négociations s’étaient accélérées ces tout derniers jours, avec l'urgence de trouver un accord acceptable par tous.  ((http://www.primature.gov.ml/index.php?option=com_content&view=article&id=9197:liberation-du-nord--le-mali-et-la-cedeao-accordent-leurs-violons&catid=5&Itemid=100037)

Il s'agissait pour le Mali de ne pas manquer le rendez-vous onusien de mercredi dernier. « Cette journée est une chance unique, reconnaît un diplomate ouest-africain. C'est là que la communauté internationale va s'engager à soutenir efficacement le Mali pour chasser les groupes islamistes du Nord. »

Paradoxalement, malgré la demande officielle du Mali, rien n’est moins sûr. Certes, l’ONU, qui a consacré une conférence à la question mercredi en marge de son Assemblée générale annuelle, admet l’ « urgence » de la situation. Mais se montre aussi, et surtout, très prudente, sur les objectifs et les modalités d’une force militaire internationale. « Toute solution militaire pour résoudre la crise sécuritaire dans le Nord du Mali devrait être envisagée avec une extrême prudence. Elle pourrait avoir de graves conséquences humanitaires », avertit Ban Ki-moon, le patron des Nations Unies.

Résultat : même si François Hollande demande que le Conseil de sécurité, seul habilité à donner le feu vert, se retrouve le plus vite possible pour étudier la question, cette réunion n’a pas encore été programmée. Et il n’est pas certain que la majorité des 2/3 (soit neuf pays sur 15) soit obtenue.  Une seule chose est sûre pour l’instant : aucun membre permanent n’apposera son veto.

 Le Mali et la CEDEAO espèrent maintenant convaincre les membres du Conseil pour qu'il donne son feu vert au recours à la force. Il faudra également convaincre le puissant voisin algérien.

Convaincre le puissant voisin algérien

L'attitude ambiguë d'Alger suscite un grand embarras dans les milieux diplomatiques notamment à Paris. Mais l'Elysée veut éviter de polluer ses relations avec l'Algérie, opposée à une intervention armée au Mali. « L'Algérie, qui a tant souffert du terrorisme, adopte une politique pouvant être assimilée dans la région à de la bienveillance envers le terrorisme ! », se désole un officiel français. Et de laisser entendre que, si l'Algérie se montrait constructive, le problème du Sahel pourrait être résolu rapidement et « sans engagement de moyens militaires non africains. »

Résoudre le casse-tête opérationnel

L'accord, sorti aux forceps et dont plusieurs points restent à finaliser (définition de la chaîne de commandement et du concept opérationnel de l'intervention militaire), servira de base à la future résolution qui sera proposée au vote des quinze membres du Conseil de sécurité. Si elle est adoptée, le plus dur restera à faire. "La CEDEAO a beaucoup de mal à réunir les 3 300 soldats promis, d'autant que les desiderata financiers des Chefs d'Etat potentiellement contributeurs sont énormes et que pas mal de leurs armées sont en limite de rupture", indique une source proche du dossier.

Se posera ensuite un casse-tête opérationnel. Bamako veut que l'armée malienne soit en première ligne. Sauf qu'il faudra d'abord en reconstituer la base sur les ruines de sa débandade lors de l'offensive rebelle de la mi-janvier, et que des clans se déchirent sa dépouille depuis le coup d'Etat militaire du 22 mars 2012. Et rien ne dit que ses forces, appuyées par le contingent de la CEDEAO, seront capables de reconquérir le Nord aux mains de quelque "6 000 combattants islamistes", selon l'évaluation d'un haut responsable français. Conscients de leurs faiblesses, la CEDEAO et le Mali attendent d'ailleurs un soutien matériel massif et multiforme (formation, renseignement, aviation de transports et de combats...) de la part de la France, principalement.

CONCLUSION

 

La requête malienne est une première étape, indispensable pour le lancement d'une intervention militaire. Mais la route promet d'être encore longue et sinueuse. Il faudra notamment convaincre le Conseil de sécurité et les plus sceptiques de l'opportunité d'une présence militaire étrangère au Mali, au nombre desquels le puissant voisin algérien. La question de l'intervention militaire et ses modalités font donc toujours débat à Bamako. Quoi qu'il en soit, cette réunion de mercredi dernier, tenue en marge de la 67ème session de l’Assemblée générale des nations Unies est un moment fort vers une éventuelle opération. Mais il faudra encore de longues semaines avant d'y voir vraiment clair. D'autant que les autorités maliennes n'ont pas complètement fermé la porte aux négociations avec les groupes armés.

 

 

Réunion extraordinaine de la CEDEAO sur les crises du Mali et de la Guinée Bissau, le "craton diplomatique" à l'épreuve des juntes militaires Weckel Philippe

Mali : La CEDEAO entre la résolution de la crise politique et institutionnelle au sud et la crise sécuritaire dans le nord Metou Brusil Miranda

 

Impact de la criminalité transnationale organisée en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel, Emmanuel MOUBITANG

Bulletin numéro 317