Le 18 juin, la Chambre de première instance I du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) a de nouveau suspendu le commencement de la présentation du dossier du Procureur dans le dossier Ratko Mladic. Alors que le procès avait été une première fois repoussé le 24 mai et devait reprendre le 25 juin, la Chambre a fait droit à une demande de reconsidération de la décision fixant la date du 25 juin. La motivation de cette décision n’est cependant pas encore disponible. Une autre décision datée du 22 juin, fixe la date de reprise des débats au 9 juillet (voir la décision et le communiqué de presse).
Si les motifs de la décision du 18 juin ne sont pas encore accessibles, il est indéniable que ce nouveau report est toujours lié à des problèmes de communication d’éléments de preuve du Procureur vers la Défense (voir la demande en reconsidération). Lors du premier report en mai, la Chambre avait indiqué : « In light of the Prosecution's significant disclosure errors, which the Chamber has addressed briefly yesterday, the Chamber hereby informs the parties that it has decided to suspend the start of the presentation of evidence. The Chamber is still in the process of gathering information as to the scope and the full impact of this error. The Chamber aims to announce the start date for the presentation of the Prosecution's evidence as soon as possible ». (Voir aussi la première décision de report du 24 mai 2012). Il semble qu’en fixant la date du 25 juin, la Chambre avait néanmoins sous-estimé l’ampleur du problème et que ce dernier reste encore aujourd’hui difficile à évaluer. D’après le Procureur un problème technique serait à l’origine de l’erreur dans la communication des éléments de preuve du dossier du Procureur à la défense. Cette communication qui se fait de manière électronique est essentielle à la poursuite de la procédure et dans un dossier comme celui de Ratko Mladic concerne des dizaines voire des centaines de milliers de pages de documents. Devant l’importance de cette procédure pour la conduite des audiences, il est surprenant que l’erreur concernant la communication de ces documents qui devaient être transmis en novembre 2011 n’ait été notée par le Bureau du Procureur qu’en mai 2012.
Devant le TPIY comme devant le TPIR, tous deux largement inspirés du système de Common Law, l’ensemble du procès repose sur les éléments de preuves déposés et par la présentation par chacune des parties de leur dossier devant la Chambre. Les parties se communiquent les éléments de preuve avec un rôle limité des juges. Il est bien entendu qu’avant toute présentation du dossier du Procureur, il est essentiel que la défense dispose de l’ensemble des éléments de preuve sur lesquels repose l’accusation et du temps suffisant pour préparer le procès. Devant l’ampleur du problème de communication des documents, la Chambre de première instance n’a pu que constater que le démarrage immédiat de la présentation du dossier du Procureur poserait une atteinte indéniable aux droits de Ratko Mladic.
Le report du procès avant même son réel démarrage est problématique au regard de la stratégie d’achèvement du TPIY mise en place par le Conseil de sécurité et alors que le procès doit durer plusieurs années. De plus, alors que Ratko Mladic se plaint d’une santé fragile et qu’il est âgé de 70 ans, ce report fait renaître ce que l’on pourrait appeler le « syndrome Milosevic » (voir les archives de sentinelle) ou la crainte que l’accusé et le fugitif le plus recherché par le TPIY ne décède en cours de procès.
TPIY : Arrestation de Ratko Mladic
Résolution de l’Assemblée nationale de Serbie condamnant le crime de Srebrenica, Philippe Weckel
Le Procureur du TPIY considère l’Europe comme la solution pour l’arrestation et le jugement de Ratko Mladic et de Radovan Karadzic, Valérie Gabard
UE/TPIY Suspension des négociations entres l’Union européenne et la Serbie – Ratko Mladic toujours en fuite, Valérie Gabard
Du TPIY à la CPI : coopération des Etats à l’arrestation des suspects, véritable enjeu de la justice pénale internationale, Valérie Gabard