Les différends sino-japonais relatifs à la souveraineté sur diverses îles en mer de Chine orientale connaissent dernièrement un nouveau regain de tension, dont l’exacerbation semble entretenue par les deux parties.
Les derniers évènements notables concernent le conflit de souveraineté qui oppose la Chine et le Japon au sujet des îles Diaoyu (nom chinois) / Senkaku (nom japonais). Dans ce différend que nous avions déjà évoqué (v. note Sentinelle Différend Chine/Japon en mer de Chine orientale et rupture des relations diplomatiques, Anne Claire Dumouchel), l'Etat japonais a lancé une offensive toute particulière, annonçant vouloir acquérir trois des cinq îles de l’archipel (au demeurant inhabité), propriétés jusqu’alors d’une famille de ressortissants japonais. Le montant de la transaction s’élèverait, selon les différentes sources, à entre 20 et 26 millions de dollars, pris sur le fonds de réserve du pays. Quel intérêt pour l'Etat d'acquérir la propriété de ces terres ? Celui de pouvoir en confier plus aisément la surveillance aux garde-côtes du pays, lui permettant ainsi de s’assurer officiellement de « l’entretien pacifique et stable des îles », officieusement des moyens de défense face à d’éventuelles actions chinoises.
La Chine n’a pas attendu longtemps pour protester, annonçant qu’elle ne céderait « aucun centimètre carré », estimant que les îles concernées sont « partie intégrante du territoire chinois » et que la transaction programmée était « illégale et invalide ». Dans les deux pays, les manifestations nationalistes se multiplient ; l’escalade de la violence doit cependant être évitée. Mais tant que les deux protagonistes ne trouveront pas un terrain d’entente, cela semble difficilement envisageable. Le Japon avait pourtant tenté d’amorcer un début de discussions, en envoyant son vice-ministre des Affaires étrangères en urgence à Pékin. Ce qui ne semble pas, à l’heure actuelle, avoir porté ses fruits. Pour les deux pays, l’enjeu est en effet de taille : si les territoires terrestres en eux-mêmes n’ont pas d’intérêt spécifique, ils n’ont d’intérêts réels ceux qu’ils portent par leur nature maritime. Les eaux particulièrement poissonneuses qui les entourent, leur potentiel avéré en gisements d’hydrocarbures, mais surtout leur positionnement intéressant en termes stratégiques constituent ainsi les principales raisons de l’âpre dispute entre la Chine et le Japon.
Un non-recours aux solutions internationales. Jusqu’à quand ?
Pour autant, malgré la persistance de leur différend, aucun des deux pays ne semble prêt à porter l’affaire devant un mécanisme de médiation, d’arbitration ou de juridiction internationale, alors pourtant que plusieurs de ces voies leur seraient offertes et qu’en l’état actuel des choses il semble que ce soit la solution la plus viable. Il est étonnant également qu’aucune des parties n’invoque de manière assurée un quelconque traité qui leur serait favorable. Ce qui s’explique certainement par le fait que, justement, ces derniers ne semblent pas leur assurer une issue prometteuse. Ainsi en va-t-il du traité du 17 juin 1971 qu’a parfois pu invoquer le Japon, au terme duquel les États-Unis restituaient Okinawa au Japon. Cependant, les îles disputées ne semblent pas devoir être comprises dans ce traité. De son côté, la Chine invoque parfois, mais timidement cependant, la Déclaration du Caire du 26 novembre 1943 et la Déclaration de Potsdam de 1945. La première restitue tous les territoires chinois occupés par le Japon à la Chine ; la seconde délimite restrictivement le territoire japonais. Mais aucun de ces instruments n’apparaît clarifier de manière univoque la souveraineté sur l’archipel. Dès lors, aucune issue certaine n'apparaissant ni pour la Chine ni pour le Japon, le recours à un tiers semblerait inéluctable. Mais n'est pas à l'ordre du jour.
Observations (Philippe Weckel)
Le gouvernement japonais a décidé d'acheter une partie de ces îles pour empêcher des municipalités de le faire. L'ingérence des collectivités locales dans le différend avec la Chine ne peut qu'accroître encore les tensions.
Les deux parties invoquent un titre originaire sur les îles remontant au XIXème siècle. On relève que les Etats-Unis se refusent à prendre parti pour l'une ou l'autre cause. Les deux Etats parties au différend ont l'obligation de régler le différend par des moyens pacifiques et ils ont une obligation de négocier en vue de parvenir à ce règlement.
Différend Chine/Japon en mer de Chine orientale et rupture des relations diplomatiques, Anne Claire Dumouchel
Signature, entre la Chine et le Japon, d'un accord sur l'exploration commune du gisement de gaz de Chuanxiao en Mer de Chine Méridionale, Michel Djimgou Djomeni
Mer de Chine : le Japon accorde un permis de forage dans la zone disputée, Tidiani Couma
Chine/Japon, incidents de Shangaï, protection des locaux diplomatiques, Philippe Weckel
Crise diplomatique entre la Chine et le Japon, Tidiani Couma
La Chine proteste contre l'intégration d'un phare au domaine public de l'Etat japonais, Tidiani Couma
Mer de Chine, tension entre Tokyo et Pékin au sujet de l'exploitation du gaz naturel, Tidiani Couma