Aller au contenu principal
x
Soumis par Metou Brusil le 25 March 2012

La conseillère pour les questions de police des opérations de maintien de la paix, mme ann-marie orler a donné une conférence de presse sur la question le 21 mars 2012. Au cours de cette conférence, elle a mis en exergue le premier rapport du secréatire général des Nations Unies sur cet aspect du maintien de la paix.  La Police des Nations Unies attire et recrute de plus en plus d’officiers spécialisés tandis que les mandats qui lui sont confiés sont de plus en plus complexes. Invitée du Point presse, Mme Orler a souligné combien les États Membres attendaient beaucoup de la Police de l’ONU et, aussi, à quel point ils contribuaient, dans le même temps, à la rendre plus rationnelle et plus efficace.   

  • Une vieille institution dans le système de maintien de la paix

L'expédition des groupes de policiers internationaux bilatéraux et multilatéraux pour conseiller et former les forces locales de police a précédé la Première Guerre Mondiale. Vers la fin des années 1800 les nations européennes ont envoyé des unités de police dans les provinces de l'Empire Ottoman en désintégration et en Albanie entre 1913-1914 pour créer une nouvelle force de police. Des moniteurs de police ont été déployés pour garder le canal de Suez en 1882, et dans le cadre de la Société des Nations à Suez en 1935. En juin 1945 les représentants de 50 nations ont signé la nouvelle charte des Nations Unies (l'ONU), qui remplaçait la Société des Nations comme organisation consacrée à la stabilité et au maintien de la paix dans le monde. En mai 1948, le Conseil de sécurité a établi un service terrain pour diriger la trêve dans la première guerre Arabo Israélienne. 36 observateurs militaires sont arrivés dans le Moyen-Orient comme premiers peacekeepers (agents de la paix) des Nations Unies. (Voir MILLS A., Commissioner Civpol, “International Policing Conference 2001, global directions: local solutions”, Adelaide, march 2001, p.2). Aujourd’hui, l’ONU parle «d’opérations de maintien de la paix multidimensionnelles» pour souligner le lien entre le «maintien de la paix» et la «consolidation de la paix» dans les Etats fragilisés. Sous l’impulsion du Secrétaire Général Kofi ANNAN et en application du Rapport BRAHIMI, le Département des Opérations de Maintien de la Paix s’est renforcé.

  • L’évolution du rôle de la police des Nations unies dans le système de maintien de la paix 

            Le rapport du Secrétaire général sur la Police des Nations Unies, premier du genre sur la question, témoigne de l’importance grandissante de la Police des Nations Unies.  Il permet d’aborder les défis auxquels elle doit faire face, ainsi que le rôle qui l’attend dans le futur. Il s’agit en fait d’un document de 23 pages qui présente tour à tour les mandats, structures et fonctions de la police des Nations Unies, fait un panorama des problèmes rencontrés par cette institution et des solutions qui y ont été apportées avant d’émettre diverses observations. À l'origine, les opérations de maintien de la paix se sont développées comme moyen de régler les conflits interétatiques en déployant, entre les parties belligérantes, du personnel non armé ou peu armé provenant d'un certain nombre de pays, sous commandement de l'ONU. Les grandes puissances faisaient appel aux casques bleus lorsqu'elles souhaitaient que les Nations Unies règlent les conflits menaçant la stabilité régionale et la paix internationale, notamment les guerres qu'elles se livraient par le biais d'adversaires tiers. Avant 1989 (fin de la guerre froide), seulement deux opérations de maintien de la paix ont comporté des composantes de police civile des Nations Unies et toutes deux ont pris place au début des années 1960. L'opération des Nations Unies au Congo (1960-1964) a fait appel à un contingent de policiers du Ghana et du Nigeria pendant quelques' mois, et l'Opération des Nations Unies à Chypre (de 1964 à nos jours). Pendant la période de la guerre froide la plupart des opérations de maintien de la paix (OMP) étaient en grande partie de caractère militaire et elles étaient lancées après qu'un cessez-le-feu se soit produit mais avant que n'importe quel règlement négocié ait eu lieu.

Dès l’introduction, le Rapport dresse un état des lieux en présentant l’importance de la police des Nations Unies. En effet, les pays en situation de conflit ou sortant d’un conflit connaissent souvent un effondrement de leur système de maintien de l’ordre public et de graves problèmes en matière de sécurité et de droits de l’homme, ce qui entame la confiance accordée par l’opinion publique aux forces de sécurité. La présence de la Police des Nations Unies contribue toutefois à rétablir la confiance de la population dans la police de l’État hôte et, plus globalement, dans l’état de droit. En promouvant une culture du service, un dialogue avec la population et une participation citoyenne, le personnel de la Police des Nations Unies aide la police de l’État hôte à regagner la confiance des populations qu’elle sert, ce qui est un facteur essentiel au fonctionnement efficace de la police nationale. Mais en dernière instance, ce sont bien les efforts visibles de la police de l’État hôte en matière de professionnalisme qui, en permettant d’améliorer nettement la sécurité, contribuent le mieux à susciter la confiance du public, et c’est vers ce but que tendent les efforts de la composante police des opérations de maintien de la paix.

            A.Présentation de la police des Nations Unies

La Police de l'ONU a un rôle important à jouer dans le maintien de la paix et de la sécurité. (http://www.un.org/fr/peacekeeping/issues/police.shtml) Les opérations de maintien de la paix de l'ONU n'ont au commencement pris aucune disposition pour une capacité civile de police. Les fonctions de maintien de la paix ont porté sur le rôle des militaires en apportant la paix aux Etats rompus et en reconstruisant l'Etat dans une société démocratique. Une grande partie de la planification et de mise en place des opérations de maintien de la paix était une responsabilité militaire. L'introduction de la police civile a été vue comme fonction subsidiaire et mineure que les militaires pourraient absorber en tant qu'élément de l'opération globale. Il y avait peu d'identification des différentes fonctions et approches du rôle de la police dans son assistance à cette mission. Les Nations Unies ont inventé le terme "Civpol (Civilian Police ou Police Civile)" (MILLS A., op. cit., p.3) pour faire la différence des  composantes de police civile et militaire utilisés dans les missions. " Je n'ai aucun doute que le monde devrait éventuellement avoir une force intégrée de police qui sera acceptée comme partie intégrale et essentielle de la vie comme les forces de police nationales sont acceptées. En attendant, nous devons être sûrs que les développements sont dans la bonne direction et nous pouvons également rencontrer des situations critiques au fur et à mesure qu'elles se produisent ", affirmait alors le Secrétaire général des Nations Unies, U. THANT  le 13 juin 1963.

L'ONU déploie des forces de police dans le cadre de ses opérations de paix depuis les années  60. En effet, en 1960, un contingent de 30 policiers originaires du Ghana était déployé pour soutenir l’Opération des Nations Unies au Congo, autorisée par la Resolution 143 (1960)  du Conseil de sécurité.  Depuis cette date, la Police des Nations Unies a  été de plus en plus sollicitée, et ses interventions ont connu une augmentation spectaculaire au cours des 15 dernières années. En 1994, on comptait seulement 1.677 policiers des Nations Unies déployés dans le monde, contre 14 333 en décembre 2011, dans le cadre de 12 opérations de maintien de la paix et de 6 missions politiques spéciales.  Au fil du temps, les taches confiées à la police des Nations Unies sont devenues de plus en plus complexes. Traditionnellement, les composantes de police de ses opérations avaient seulement pour but de surveiller, d'observer et de faire un rapport. À partir du début des années 90, la police a également été chargée d'un rôle consultatif et de tâches d'accompagnement et de formation, notamment afin de permettre aux opérations de maintien de la paix de jouer un rôle de mécanisme correctif auprès de la police et des autres services nationaux chargés de l'application des lois. Les missions qui sont de nos jours confiées à la Police des Nations Unies lui demandent d’aider les États hôtes et les autres partenaires à reconstruire et à réformer leur police nationale et leurs autres institutions de maintien de l’ordre, ainsi que de fournir une assistance  opérationnelle couvrant tout le spectre des tâches incombant à la police. Cette exigence accrue, aussi bien dans l’échelle que dans la complexité des tâches, a inévitablement modifié du tout au tout la physionomie de la Police des Nations Unies.  Le besoin d'aider à la mise en œuvre des mandats du Conseil de sécurité a considérablement augmenté. Le nombre d'agents de police autorisés à se déployer dans des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales est passé de 5 840 en 1995 à plus de 17 500 en 2010. Contrairement au personnel militaire, la police civile travaille et vit habituellement dans la communauté locale, bien souvent logeant dans une famille; elle est donc de bien des façons les yeux et les oreilles de l'opération de maintien de la paix.

            B. Mandats de plus en plus essentiels évolutifs

C’est en 1964 que le terme de Police Civile (CIVPOL) est apparu, au sein de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP). Jusque dans les années 1980, le rôle des policiers civils fut alors d’accompagner les polices locales, de les conseiller, et plus rarement d’exercer un monitorat. Leur engagement restait alors sporadique et en soutien à l’effort principal pris en charge par les contingents militaires internationaux. Mais le sens et la portée de la présence policière internationale dans les missions de paix changèrent radicalement à partir de 1989 et de l’opération en Namibie (Groupe d’assistance des Nations Unies pour la transition, 1989 - 1990). Quelque 1500 policiers furent alors déployés pour assister l’ensemble du processus par la fonction de monitorat de la police locale et le soutien aux élections. Pour la première fois, les CIVPOL n’étaient plus sous commandement militaire et constituaient à eux seul une composante de la mission de paix multidimensionnelle. Amorçant un virage vers des missions toujours plus intrusives et étendues, les Nations Unies attribuèrent un rôle spécifique aux CIVPOL dans les autres missions, avec notamment une composante policière très importante (3600 personnels) au sein de l’Autorité provisoire des Nations Unies au Cambodge (1992 - 1993) La Police des Nations Unies est appelée à accomplir trois catégories de missions qui sont :

 

a) appuyer la réforme, la restructuration et la reconstruction de la police nationale et des autres entités chargées du maintien de l’ordre. A cet égard, La Police des Nations Unies s’est vu confier ses premières tâches relevant du développement institutionnel dans les années 90, notamment dans le cadre de  missions au Cambodge, en Haïti et en Bosnie-Herzégovine. Depuis 2003, presque tous les nouveaux mandats comprennent des tâches de réforme, de restructuration et de reconstruction. Si la reconstruction de la structure d’un pays est une proposition à long terme, celle d’une formule de paix qui est l’addition de l’ordre et de la justice, décrivant l'équilibre nécessaire entre les divers composants de la société, celle-ci comprendra certainement les militaires et la police qui auront des rôles appropriés. Dans ce cadre de complémentarité, les militaires fournissent "l’ordre" tandis que la police et le système judiciaire fournissent "la justice". Dans ce cas, le maintien de l'ordre civil n'est pas identique à celui que crée les forces militaires, parfois ce fait tend à être ignoré. Le maintien de l'ordre civil se fait sur le long terme. Il exige des accords clés avec les éléments politiques du gouvernement hôte, des civils, et autres. S'ils sont bien développés, ces accords fournissent la base pour endurcir le changement.

b) fournir à ces dernières une assistance opérationnelle, grâce notamment au déploiement d’unités de police constituées : Dans ce cadre, Huit des 18 missions en cours ont mandat pour fournir une assistance opérationnelle à la police de l’État hôte, notamment par l’intermédiaire d’unités de police constituées, par exemple dans le domaine des enquêtes, de la sécurité en période électorale ou de la sécurité dans les camps de réfugiés et de personnes déplacées. Le travail de ces unités inclut généralement des opérations tactiques menées conjointement avec la police nationale dans le domaine du maintien de l’ordre public, des patrouilles pour rendre visible l’action de la police ainsi que la protection des civils et du personnel et des installations des Nations Unies (Cas du Timor Leste, Haïti, RDC, Libéria). Toutes les missions ayant mandat pour fournir une assistance opérationnelle ont également reçu un mandat de protection des civils se trouvant sous la menace imminente de violences physiques. Les mesures dans ce domaine comprennent des patrouilles préventives dans les camps de personnes déplacées, des opérations conjointes avec les composantes militaires des Nations Unies et le renforcement des capacités de la police de l’État hôte dans tous ces domaines.

 c) assurer des services de police intérimaire et d’autres fonctions de maintien de l’ordre : La Police des Nations Unies s’est vu confier l’entière responsabilité des services de police et des autres tâches de maintien de l’ordre dans des missions où les services de la police nationale étaient au départ défaillants, les cas les plus récents étant le Kosovo et le Timor-Leste. La Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) a été chargée de la responsabilité de « maintenir l’ordre public, notamment en mettant en place des forces de police locales et, entre-temps, en déployant du personnel international de police servant au Kosovo » [résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité, par. 11 i)]. Après avoir graduellement transféré ses responsabilités au Service de police du Kosovo, la composante police de la MINUK a connu une réduction drastique de ses effectifs et elle a cessé d’exercer la plupart des responsabilités qui lui restaient lorsque la Mission État de droit menée par l’Union européenne au Kosovo (EULEX Kosovo) a pris le contrôle des opérations dans le domaine de l’état de droit au Kosovo, en 2008.

Par ailleurs,  nombre de mandats récents font explicitement référence à la promotion et à la défense des droits de l’homme, ainsi qu’à la protection des civils, ce qui souligne le rôle crucial de la Police des Nations Unies dans la mise en œuvre de tâches concernant l’ensemble des missions.

            II.Structure et fonction des composantes de police des nations unies

L’organisation des composantes de police des Nations Unies dans les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales est conçue pour refléter le mandat global des missions, les structures de police de l’État hôte, la situation politique et en matière de sécurité et les domaines prioritaires d’intervention. Ces facteurs déterminent également les profils du personnel requis. Le chef de la composante de police rend directement compte au chef de la mission ou, dans certains cas, au représentant spécial adjoint du secrétaire général chargé de l’état de droit. Il dirige tous les membres de la composante de police, est comptable devant le chef de la mission de la supervision et de la conduite de la composante de police et est particulièrement chargé de veiller à l’exécution des tâches de police assignées et au strict respect des politiques et procédures en vigueur à l’ONU.

 Il lui incombe également de s’assurer que les normes de conduite de l’ONU, notamment celles relatives à l’interdiction de toute exploitation et tous sévices sexuels, sont scrupuleusement observées. Il lui appartient en outre d’élaborer et de mettre en œuvre, en coopération avec la composante déontologie et discipline de la mission, une stratégie visant à prévenir tous manquements. Sous l’autorité du chef de la mission, le chef de la composante de police peut mener des enquêtes sur des cas de manquement présumé de la part des membres de la composante de police, y compris d’exploitation et de sévices sexuels, en coordination avec d’autres composantes de la mission. Une unité d’enquête interne aide dans le déroulement des enquêtes administratives lorsqu’elles ne sont pas effectuées par le BSCI.

Les membres du personnel de police des Nations Unies sont souvent installés dans les mêmes locaux que ceux de leurs homologues de l’État hôte. Il s’agit d’un élément clef permettant d’accroître l’impact des programmes d’appui à la police de proximité grâce à un transfert efficace de connaissances et de compétences, permettant notamment d’allier le savoir-faire des agents de la police nationale et celui de l’ONU. La présence des membres du personnel de police des Nations Unies dans ces situations peut également constituer un important moyen de prévenir les violations des droits de l’homme. Étant donné que la Police des Nations Unies n’est qu’une composante des missions pluridimensionnelles, la coordination est des plus importantes. Pour assurer la cohérence à l’échelle de la mission, le personnel des composantes de police participe activement aux mécanismes de coordination intégrée des missions tels que l’équipe de direction intégrée, l’équipe de gestion de la sécurité, le Centre d’opérations conjointes, la Cellule d’analyse conjointe de la Mission et le Centre mixte des opérations logistiques. La Police des Nations Unies participe pleinement à la planification des missions intégrées. Là où ils ont été élaborés par des missions et l’équipe de pays des Nations Unies, les cadres stratégiques intégrés ont facilité l’exécution des tâches prescrites au personnel de police des Nations unies, surtout en définissant les responsabilités et les priorités et en renforçant le respect du principe de responsabilité.

L’exécution des aspects des mandats des missions liés à la sécurité rend l’instauration d’une étroite coopération entre la composante de la police et la composante militaire d’une mission essentielle, d’où la planification mixte, les manoeuvres conjointes, l’échange d’informations et la coordination élargie auxquels on assiste régulièrement. Toute intervention menée pour venir en aide à la police de l’État hôte  doit s’inscrire dans le cadre d’une action élargie de nature à combler les lacunes dans le domaine de l’état de droit, en particulier celui du secteur de la justice pénale. Les composantes de police collaborent étroitement avec les composantes des droits de l’homme des missions, par exemple en aidant à mener des enquêtes sur les violations des droits de l’homme.   Elles coopèrent aussi avec les groupes de l’égalité des sexes dans les missions, notamment au sujet de l’élaboration de politiques, de la nomination de responsables de la coordination des questions d’égalité des sexes et de la création d’unités spéciales chargées de la lutte contre la violence sexuelle et sexiste au sein des commissariats de police restructurés. De surcroît, la Police des Nations Unies assure une forte complémentarité entre ses activités et celles du PNUD de manière à appuyer le renforcement des capacités des ministères de tutelle, des processus de réforme de la police et des structures de gouvernance et de responsabilisation, par exemple, en Côte d’Ivoire et au Soudan du Sud.

III.Problèmes rencontrés par la Police des Nations Unies et solutions qui y ont été apportées

Les opérations de maintien de la paix des Nations Unies se heurtent à des problèmes fondamentaux. Il y a souvent de grands écarts entre les mandats définis par le Conseil de sécurité et les ressources fournies par l’Assemblée générale. Il se peut également qu’il y ait une faible volonté politique de la part des pays d’appliquer certains aspects des mandats des missions. En effet,eEn cherchant les effectifs nécessaires pour la police civile l'ONU a publié des directives aux pays de contributions au sujet des qualifications professionnelles demandées et des conditions requises pour la mission. Un nombre considérable d’officiers de police qui ont été envoyés au Cambodge n'arrivait pas à atteindre les conditions requises. Ainsi « beaucoup ne parlaient ni l’anglais ni le français, les deux langues officielles d'UNTAC ; beaucoup manquaient le niveau de base pour conduire les véhicules de l’ONU, ou même n’avaient pas de permis de conduire, et beaucoup n'avaient pas le minimum d'expérience professionnelle de six ans, ou dans certains cas aucune expérience de police du tout », remarque  Janet E. Heininger (Peace Keeping in Transition: United Nations in Cambodge, New York: XX. Centurie, 1994, 182 p.)

Qui plus est, les situations de conflit et d’après conflit sont intrinsèquement difficiles, car les sociétés elles-mêmes sont généralement divisées, les ressources financières limitées, les infrastructures inadéquates, le climat politique et les conditions de sécurité des plus instables et la sécurité et l’administration de la justice précaires. Tous ces facteurs influent sur l’application des aspects des mandats des missions liés à la police. un certain nombre de difficultés afférentes à la police peuvent être résolues par des interventions adéquates consistant notamment à établir un ensemble de politiques et directives techniques afin de s’assurer de l’existence de bonnes pratiques et d’une uniformité d’approche entre les missions; à veiller à ce que tous les membres du personnel de police des Nations Unies disposent des compétences et de l’équipement nécessaires pour s’acquitter de leurs mandats actuels; à faire en sorte que tous les nouveaux membres du personnel et des unités qui arrivent aient reçu la formation type qu’offre l’ONU à ses agents avant de les déployer; à développer les compétences et programmes permettant de remédier aux problèmes liés notamment à la protection des civils, à la violence sexuelle et sexiste et à la criminalité organisée; et à renforcer la coordination avec les partenaires internationaux.

La protection des civils réside au coeur de l’action de la police. Les civils pris dans un conflit et ceux ciblés par la violence dans des situations d’après conflit précaires s’exposent à toute une série de menaces dont la Police des Nations Unies peut aider à atténuer les effets. Outre le soutien opérationnel qu’elle apporte par le biais de ses unités de police constituées, la Police des Nations Unies aide à renforcer les capacités de la police de l’État hôte dans ce domaine et à mettre en place des mécanismes d’alerte précoce en utilisant ses contacts étroits avec la population civile.

La criminalité organisée étant considérée comme l’un des phénomènes les plus nocifs aux efforts d’instauration d’une paix durable, d’atténuation de la pauvreté et de promotion du développement économique et de la stabilité, la Division de la police a examiné les types de soutien qu’elle pourrait mobiliser pour aider les pays où elle est déployée à combattre ce fléau. La Police des Nations Unies s’emploie de plus en plus à renforcer les capacités nationales de lutte contre la criminalité organisée et la corruption notamment en créant des cellules de lutte contre la criminalité transnationale dans les services de police des États hôtes, en se concentrant dès le départ sur la formation de spécialistes nationaux dans des domaines comme la planification et la mise en œuvre stratégiques, les enquêtes et la criminalistique, l’administration et d’autres compétences vitales.

Pour mieux assurer la standardisation au sein de la Police des Nations Unies, la Division de la police définit actuellement un cadre d’orientation stratégique qui contribuera à l’élaboration de nouvelles directives. Le cadre renforcera l’efficacité de la Police des Nations Unies dans les opérations de maintien de la paix en favorisant le recours à une approche plus cohérente et harmonieuse en matière de garantie de la sécurité publique, de réforme de la police et de soutien aux services de police de l’État hôte. Il devrait également fournir une base plus sophistiquée de recrutement du personnel doté des compétences spécialisées et de l’expérience nécessaires en définissant clairement les tâches prévues et en dégageant les principaux paramètres de travail. À l’aide du cadre d’orientation stratégique, les planificateurs devraient pouvoir procéder à une évaluation des tâches réalisables dans une zone de conflit donné et déterminer comment les aborder et notamment sélectionner et former le personnel compétent. Mû par son ambition de professionnaliser davantage la Police des Nations Unies, le Secrétariat a conçu, modifié et uniformisé un emblème pour elle.

Malgré l’élaboration du cadre d’orientation stratégique, l’application des directives actuelles et futures demeurera difficile. Il y a lieu de renforcer le travail de sensibilisation, de formation, de suivi et d’évaluation en matière de respect des directives. L’accent sera placé davantage également sur la nécessité pour la haute direction, en particulier le chef de la composante de police, de veiller à ce que les directives en vigueur soient pleinement appliquées. Cela dit, des activités de police menées sur la base d’une vision et d’une conception communes assureront non seulement cohérence et uniformité, mais permettront également d’effectuer un véritable travail de suivi et d’évaluation pour la toute première fois.

            IV.Nécessité d’une plus grande responsabilisation de la police des Nations Unies

Plus de 14 400 agents de police issus de 80 pays sont actuellement déployés dans 11 missions de maintien de la paix et 7 missions politiques spéciales à travers le monde; ou seront prêts à l’être, bientôt, dans la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA).  Ils restent en moyenne entre 6 et 18 mois sur le terrain. Ils contribuent à l’appui et au renforcement des capacités des États en aidant, par exemple, les forces de police du pays hôte à recruter, former, déployer ou administrer leurs propres services, a expliqué la Conseillère.  Mme Orler, qui entame sa troisième année aux fonctions de Conseillère pour les questions de police, a aussi réaffirmé que l’une des priorités de la Police de l’ONU était d’accroître ses effectifs féminins et d’atteindre l’objectif de 20% de femmes parmi ses rangs d’ici à 2014. « En 2009, les femmes représentaient 7% des effectifs.  Nous sommes à présent à mi-chemin, avec 10%.  Ce n’est pas encore suffisant mais nous sommes sur la bonne voie », a-t-elle estimé. 

En ce qui concerne les normes de conduite de la Police de l’ONU, Mme Orler a rappelé que la « tolérance zéro » en matière d’exploitation ou de sévices sexuels demeurait le leitmotiv du Département des opérations de maintien de la paix mais, a-t-elle ajouté, il est à présent temps d’avancer vers « zéro incident ». Tout agent qui fait l’objet d’allégations est immédiatement retiré du terrain et rapatrié vers son pays d’origine.  Le dossier d’enquête est ensuite transmis à l’État Membre dont il est originaire, tandis que le Département suit avec la plus grande attention toute mesure ou action entreprise par la suite, a-t-elle expliqué. Elle a, dans la foulée, invité les États Membres à ne faire montre d’aucune forme d’impunité pour les auteurs de tels faits. Interrogée au sujet d’un ancien agent de la Police de l’ONU qui avait été condamné à une année de prison pour le viol d’un garçon de 14 ans en Haïti, Mme Orler a cependant précisé que chaque État Membre avait son échelle de peine et qu’elle n’avait pas à la commenter. Elle a indiqué que, dans l’affaire en question, ses services avaient envoyé immédiatement une équipe sur le terrain pour mener l’enquête dans les plus brefs délais.

A cet égard, il faut signaler qu’aucune réforme de police ne sera réussie sans insister sur la responsabilité de la police. La police en tant qu'institution doit démontrer un engagement envers les droits de l'homme qui dépasse la formation et inclut les corps d'audit qui enquêtent et punissent la mauvaise conduite ; incorporer les principes de droits de l'homme à toutes les procédures opératoires comprenant le personnel de recrutement, de promotion et de gestion ; et rendre compte publiquement des recherches sur les abus et les statistiques de crime en général. Les mécanismes de contrôle de la police servent à des buts importants en plus de l'évaluation des comportements et de la punition des mauvaises conduites. L’unité des affaires intérieures ou le bureau de l' Inspecteur Général "assiste la police, en analysant et en changeant les systèmes de régularisation et de gestion et les pratiques policières, a raffiner leur capacité et améliorer leur performance, dans l'efficacité et l'éthique." Par opposition aux poursuites criminelles qui affectent très peu d'officiers et ont limité l'impact direct sur le comportement, les mécanismes disciplinaires internes, si elles restent objectives, ont un grand potentiel pour encourager le bon comportement puisqu'ils influencent directement la carrière d'un officier. Les évaluations de performance entrent dans les dossiers du personnel, qui affectent alors les promotions, les transferts, les tâches et les occasions pour davantage de perfectionnement en formation et en qualifications.

            Il convient d’associer dès le départ les principaux acteurs de la scène locale –magistrature, experts de l’administration, société civile et secteur privé : « Dans la mesure du possible, nous devrions guider plutôt que diriger, et renforcer plutôt que remplacer. L’objectif doit consister à voir s’implanter, au terme de l’intervention de l’Organisation des Nations Unies, des institutions nationales fortes. » (Cf. Vers un projet commun, Essai de synthèse d'extraits de communiqués de presse des Nations Unies, Nations unies 2003, p.6, http://membres.lycos.fr/afnulorraine)

Bulletin numéro 299