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Soumis par Moubitang Emmanuel le 18 March 2012

Le Comité des Droits Economiques, Sociaux et Culturels, des Nations Unions(CODESC) à donné la définition du droit à l’eau et des obligations corrélatives des Etats qui fait aujourd’hui autorité en droit international. Selon cette définition, le droit à l’eau est « le droit à un approvisionnement suffisant, physiquement accessible et à un coût abordable, d’une eau salubre et de qualité acceptable pour les usages personnels et domestiques de chacun » (www.un.org/News/fr-press/docs/2010/AG10967.doc.htm). Si le droit à l’eau est devenu pour la plupart des Gouvernement un droit économique] et social ; sa mise en œuvre effective » nécessite  encore de gros efforts au plan juridique. Dans une «  Déclaration commune sur l’accès à l’eau et sur la gestion concertée du bassin du Niger » remise au Forum Mondial de l’Eau qui s’est tenu du 12 au 17 mars 2012 à Marseille,  en France ; les Chefs d’Etats et de Gouvernement des neuf Etats africains regroupés au sein de l’Autorité du Bassin du Niger ( ABN) à savoir : Burkina Faso, Cameroun, Mali, Niger, Nigéria, Tchad, Côte d’Ivoire et Guinée « s’engagent à placer l’assainissement et l’accès à l’eau au rang des priorités de l’action publique » (Déclaration disponible sur le Site officiel de la Présidence tchadienne http://www.presidencetchad.org/affichage_news.php?id=276&titre=%20Lire%20la%20D%E9claration)

Selon le texte, face aux défis posés par «la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement, d’une part, les perspectives d’évolution démographique sociale, économique et environnementale dans [lesdits] pays et d’autre part, les incertitudes sur les supports en eau futurs dans le Bassin du Niger du fait des changements climatiques »,  La ratification des conventions Internationales (I)  et le renforcement de la coopération régionale (II) apparaissent comme des solutions majeurs.

  • LA RATIFICATION DES CONVENTIONS INTERNATIONALES

Comme premier principe adopté dans la Déclaration de Marseille du 12 mars 2012, «  les Etats membres de l’ABN  s’engagent à ratifier, s’ils ne l’ont déjà fait , la Convention des Nations Unies adopté en 1997 relative aux utilisations des cours d’eaux internationaux à des fins autres que la navigation, unique instrument juridique à vocation universelle régissant  l’utilisation, la gestion et la protection des cours d’eaux partagés » (http://untreaty.un.org/ilc/texts/instruments/francais/traites/8_3_1997_francais.pdf). Cette convention ne compte aujourd’hui  que 24 Etats parties, alors que 35 Etats  sont nécessaires à son entrée en vigueur. Dans le Bassin du Niger, seuls deux Etats l’ont ratifiée à ce jour : Le Nigéria et le Burkina Faso. Le Parlement béninois vient d’adopter le projet portant ratification.

Cependant le droit à l’eau  et le droit à l’assainissement ont été reconnus dans la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, en 1979 (http://www.un.org/womenwatch/daw/cedaw/text/fconvention.htm), et dans la Convention relative aux droits de l’enfant en 1989 (http://www.unhchr.ch/TBS/doc.nsf/0/14dad2c1a28b6b57c1256ff600363efe/$FILE/G0540733.pdf). La première prévoit que les Etats parties doivent assurer aux femmes vivant en milieu rural le droit de «bénéficier de conditions de vie convenables notamment en ce qui concerne le logement, l’assainissement, l’approvisionnement  en électricité et en eau»  (article 14, paragraphe 2). La seconde prévoit que les Etats parties doivent lutter contre les maladies et la malnutrition grâce «  à la fourniture d’aliments nutritifs et de l’eau potable, compte tenu des dangers et des risques de pollutions du milieu naturel » (article 24, paragraphe 2).

Au niveau régional, la reconnaissance la plus explicite du droit  à l’assainissement se trouve dans les instruments de protection des droits des femmes et de l’enfant. Dans le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes, les Etats se sont engagés à assurer l’accès à l’eau potable des femmes (article 15) et à réglementer la gestion, la transformation, le stockage et l’élimination des déchets domestiques (article 18). Dans la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, ils se sont engagés à prendre les mesures nécessaires pour assurer la fourniture d’eau potable aux enfants (article 14, paragraphe 2).Ces textes  méritent également d’être ratifiés pour ceux des Etats qui n’y sont pas encore partie.

Sur le plan international et de leur gouvernance, conformément au 9ème principe de la Déclaration de Marseille, «  les Etats membres prendront les mesures nécessaires pour la mise  en œuvre de la Charte de l’eau du Bassin du Niger ». Les Etats membres de l’Autorité du Bassin du Niger ont adopté la Charte de l’eau du Bassin du Niger qui est entrée en vigueur le 19 juillet 2010. Ce texte moderne, innovant et audacieux constitue l’un des traités internationaux qui a consacré de manière formelle le droit fondamental d’accès à l’eau, reconnu par l’Assemblée Générale  des Nations  Unies en juillet 2010.

La reconnaissance par les Nations Unies du droit à l’eau et à son assainissement confère désormais une priorité accrue à la satisfaction de ce besoin essentiel (Déclaration de Marseille, principe 5). A cette fin, «les Etats membres  s’engagent à mettre en œuvre les principes de la vision partagée, notamment lors de la programmation de nouveaux projets de grands barrages, et par le renforcement de l’Autorité du Bassin du Niger » (Déclaration de Marseille, principe 8).

II-LE RENFORCEMENT DE LA COOPERATION REGIONALE

L’inégale répartition du fleuve Niger (le Mali, le Niger et le Nigéria à eux seuls regroupent 82% du cours du fleuve), l’importante croissance démographique, les conditions climatiques souvent extrêmes et les effets du changement climatique induisent une très forte interdépendance entre les Etats. Ces défis rendent nécessaire une gestion commune afin d’assurer une utilisation raisonnable et équitable de la ressource. La concertation, la coopération et l’intégration en sont les trois principes essentiels. Ils exigent des relations diplomatiques stables et la réalisation de projets communs. C’est cet esprit de solidarité qui a conduit en 1980 à la création de l’Autorité du Bassin  du fleuve Niger (ABN) dont le siège est à Niamey (http://www.abn.ne/). L’idée de création d’un organisme public chargé de promouvoir la mise en valeur des ressources du Bassin du fleuve Niger, remonte à l’époque coloniale au début des années 1950 avec la création à Bamako, de la Mission d’Etude et d’aménagement du Niger (MEAN).                               

L’ABN a pour mission de promouvoir la coopération entre les pays membres et d’assurer un développement intégré du bassin dans tous les domaines par la mise de ses ressources. L’Autorité du Bassin du Niger(ABN) est l’une des plus ancienne Organisations Intergouvernementales africaines, si l’on fait remonter sa création à 1964 à Niamey sous sa forme originale qui était la Commission du Fleuve Niger. La Commission du fleuve Niger a fonctionné pendant 17 ans et ses résultats furent jugés insuffisants. Les Etats membres ont décidé de la remplacer par une nouvelle organisation, l’Autorité du Bassin du Niger, héritière de tous les avoirs et assumant toutes les obligations de la Commission du fleuve Niger. L’ABN à pour mission de promouvoir la coopération entre les pays membres et d’assurer un développement intégré du Bassin dans tous les domaines par la mise en valeur de ses ressources notamment sur le plan de l’énergie, de l’hydraulique, de la l’agriculture, de l’élevage, de la pêche, de la pisciculture, de la sylviculture, de l’exploitation forestière, les transports et communication et de l’industrie. La Convention révisée de 1987 à assigné à l’ABN, les cinq (5) objectifs majeurs suivants :

1- Harmoniser et coordonner les politiques nationales de mise en valeur des ressources du bassin ;

2- Planifier le développement du bassin en élaborant un plan de développement intégré du bassin ;

3- Concevoir, réaliser, exploiter et entretenir les ouvrages et des projets communs ;

4- Assurer le contrôle et la réglementation de toute forme de navigation sur le fleuve, ses affluents et sous-affluents conformément à «l’Acte de Niamey », et

5- Participer à la formulation des demandes d’assistance et à la mobilisation des financements des études et travaux nécessaires à la mise en valeur des ressources du bassin.

Les partenaires internationaux ont un rôle essentiel d’accompagnement dans cet effort, en participant au financement d’une part, de l’accès à l’eau et à assainissement et d’autre part, du Programme d’Investissement 2008-2027 du Bassin du Niger adopté en 2008.

En outre, la mise ne œuvre effective des redevances prévues par la Charte de l’Eau et son annexe environnementale et désormais impérative (Déclaration de Marseille, principe 5). Ces redevances permettront d’améliorer la gestion qualitative et quantitative des ressources en eau partagées, superficielles ou souterraines et de fournir à l’Autorité  du Bassin du Niger, les moyens d’assurer efficacement ses fonctions de coordination, de planification, de suivi et de prévision au bénéfice des utilisateurs.

Texte de la  Déclaration commune des chefs d’Etat

Des pays du bassin du Niger Sur l’accès à l’eau et sur la gestion concertée du bassin du Niger

(http://www.presidencetchad.org/affichage_news.php?id=276&titre=%20Lire%20la%20D%E9claration)

 « Nous Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Autorité du Bassin du Niger, réunis à Marseille,

Le 12 mars 2012, à l’initiative de la fondation Chirac, pour la Conférence « Solidarité pour L’eau dans le bassin du Niger : des engagements pour des solutions » présentée dans le cadre Du 6éme Forum Mondial de l’Eau.

Nous référant à la Convention d’octobre 1987 révisée portant création de l’Autorité du Bassin Du Niger à N’Djaména (Tchad)

Considérant que l’accès à l’eau potable et à l’assainissement est un droit fondamental tel que Le reconnaît l’Organisation des Nations Unies et le Conseil des Droits de l’Homme ;

Considérant que dans les neuf pays du Bassin du Niger, des franges importantes de la Population n’ont pas accès à ce droit fondamental, ce qui est contraire à la dignité humaine et Constitue une injustice génératrice de déséquilibres et de tensions ;

Conscients des menaces que font peser sur la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement, d’une part, les perspectives d’évolution démographique sociale, économique et environnementale dans nos pays et d’autre part les incertitudes sur les supports en eau futurs dans le Bassin du Niger du fait des changements climatiques ;

Reconnaissant la communauté d’intérêts qui lie les Etas membres de l’ABN dans l’exercice de leurs droits et de leurs obligations dans la gestion des ressources en eau du bassin ;

Considérant la déclaration de Niamey du 12 septembre 2003 relative au processus d’élaboration d’une Vision partagée pour le développement du Bassin du Niger ;

Adoptons les principes suivants :

1. Les Etats membres de l’ABN s’engagent à ratifier, s’ils ne l’ont déjà fait, la Convention des Nations Unies adoptée en 1997 relative aux utilisations des cours d’eau internationaux à des fins autres que la navigation, unique instrument juridique à vocation universelle régissant l’utilisation, la gestion et la protection des cours d’eau partagés ;

2. Les Etats membres de l’ABN considèrent comme indispensable la bonne compréhension du « territoire hydrologique » que constitue le bassin du Niger afin de disposer de toute l’information nécessaire aux prises de décision. Ils s’engagent à mettre en oeuvre les moyens indispensables pour cela en renforçant les réseaux de mesure et les structures en charge de les maintenir, en encourageant la conception de modèle et en soutenant les études et les recherches associées ;

3. Les Etats membres s’engagent à placer « l’assainissement » au rang des priorités de l’action publique, au même titre que « l’accès à l’eau ». Pour ce faire, ils appliqueront le principe de « pollueur –payeur » inscrit dans la Charte de l’eau du bassin du Niger, et ils s’attacheront à développer l’accès des populations à un service d’assainissement ainsi qu’à une éducation à l’hygiène en zone urbaine comme en zone rurale ;

4. Les Etats membres considèrent comme nécessaire et prioritaire l’optimisation de la consommation en eau et s’engagent à l’inciter efficacement, notamment s’agissant des pratiques d’irrigation ;

5. La reconnaissance par les Nations Unies du droit à l’eau et à son assainissement confère désormais une priorité accrue à la satisfaction de ce besoin essentiel. A cette fin, les Etats membres mettront en oeuvre des mécanismes de financement à l’échelle nationale et régionale, en renforçant les contributions étatiques et en appliquant le système de redevances prévu par la Charte de l’eau du Bassin du Niger et son annexe environnementale. Ils invitent les organismes bilatéraux et multilatéraux à s’associer à ces efforts par un accroissement significatif de leurs contributions.

6. Les Etats membres s’engagent à traduire dans leurs budgets nationaux leur priorité pour l’accès à l’eau et à l’assainissement, et à encourager fortement les contributions financières des organismes bilatéraux et multilatéraux dans ces domaines sur la base des stratégies déterminées par leurs propres besoins ;

7. Les Etats membres prendront les mesures nécessaires pour encourager l’ensemble de leurs collectivités territoriales à s’approprier les principes ici énoncé, et  encourageront les actions de coopération décentralisée permettant de les mettre en pratique ;

8. Les Etats membres s’engagent à mettre en oeuvre les principes de la Vision Partagée, notamment lors de la programmation de nouveaux projets de grands barrages, et par le renforcement de l’Autorité du Bassin du Niger ;

9. Les Etats membres prendront au plan de leur législation internationale et de leur gouvernance, les mesures nécessaires pour la mise en oeuvre de la Charte de l’eau du Bassin du Niger, en concertation avec la société civile et le représentant de la Jeunesse.

Tous conscients de l’importance de cet enjeu pour les générations futures, nous nous engageons à mettre en oeuvre ces principes et signons cette déclaration.

 

Le droit à l'eau, droit créance : les obligations de l'Etat et les distributeurs privés

Bulletin numéro 298